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Toutes les publications

Tahar Rahim dans la prison dans Désigné coupable
Le Majeur en crise

« Désigné coupable » de Kevin McDonald : La Constitution des États-Unis, l’autre conquête de l’Ouest ?

17 août 2022
Le thème de la frontière, notamment dans le cinéma nord-américain, n’a jamais cessé de produire une certaine image de l’Amérique, confiante ou défaite, comme la mise en récit de la construction d’un peuple singulier. À cette histoire de la frontière, dont la conquête de l’Ouest est le pendant quasi naturel, qui a été tantôt physique, terrestre, mais aussi spatiale, mentale, autant que culturelle, économique, sociale... nombre de productions hollywoodiennes, comme le dernier film de Kevin McDonald, Désigné coupable, en attestent et y ajoutent la conquête du droit, soit la mise en norme comme la mise en règle d’une société donnée à travers ses commandements juridiques. Ou comment la Constitution des États-Unis apparaît comme l’autre conquête de son Ouest, mais pour produire un film sur le droit, dans le cas de Désigné coupable, prétendument critique à l’égard de la législation du Patriot Act, mais qui se parjure finalement lui-même, la reconduisant dans ses motifs comme ses principes.
Otis James (Daniel Kaluuya) à cheval dans le désert face aux extraterrestres dans Nope
Critique

« Nope » de Jordan Peele : Le magicien ose moins qu’il dose

12 août 2022
Le cinéma fait lever les yeux, le grand les écarquille, le bon en fait voir le blanc. Avec un troisième long-métrage qui demande contre toute une tradition de se méfier de ce qui vient du ciel, Jordan Peele aimerait souffler un peu d’air frais dans la sphère de la culture saturée. Mais l’enflure guette, même en ayant les pieds sur la terre du western. Nope est exemplaire d’un cinéma si conscient de lui-même qu’il doit accomplir des prouesses pour simplement réussir à retomber sur ses pieds. Lever les yeux au ciel n’est pas sans danger, le risque étant celui de la voracité et de l’indigestion, ufologie pour ironiser et méta-cinéma pour tenter encore de moraliser le spectacle. Nope est un film littéralement gonflé, qui ne raconte rien sinon ce qu’il en est des blockbusters crevant les plafonds avant d’éclater comme des ballons.
Pierre (Jean Desailly) embrasse Nicole (Françoise Dorléac) dans son lit dans La Peau douce
Rayon vert

Aimer c'est voler, aimer c'est fuguer (sur deux films de François Truffaut)

11 août 2022
Vivre c'est voler du temps au temps et aimer n'est désirable que clandestinement. François Truffaut à sa manière poursuit Jacques Becker en continuant de filer à vive allure les histoires de l'homme pressé. Le temps presse, celui des contrats, des obligations et des devoirs et l'homme pressé bat la mesure de son désir en le dérobant comme s'il s'agissait de grappiller des intervalles, inserts de La Peau douce (1964) et parenthèses de L'Homme qui aimait les femmes (1977), autant de plaisirs volés comme les baisers. Le confort bourgeois n'a jamais empêché François Truffaut d'écrire sa propre version du Journal du voleur de Jean Genet.
Le Quai10 à Charleroi
Histoires de spectateurs

Une brève histoire d'amour et de cinéma au Quai10 de Charleroi

7 août 2022
Récit d'une brève histoire d'amour et de cinéma au Quai10 de Charleroi, un cinéma qui se pose à la fois comme un refuge pour les cinéphiles et un lieu possible de mélancolie. Ou comment penser l'avenir de la salle de cinéma au plus près de l'expérience spectatorielle.
Elsa Wolliaston dans le rôle de Magdala
Esthétique

« Magdala » de Damien Manivel : La puissance de l’esquisse

4 août 2022
En donnant a priori des « clés », des indices, à son spectateur afin de l'orienter vers une grille de lecture d'un film qui s'attache aux détails et à ce qu'ils peuvent évoquer en nous, Damien Manivel développe dans Magdala tout un art de l'esquisse et propose une expérience spectatorielle stimulante et réflexive.
River Phoenix dans A bout de course
Rayon vert

« À bout de course » de Sidney Lumet : L’art de la fugue

2 août 2022
Il y a dans À bout de course de Sidney Lumet une tension entre mouvement et fixité. Cette dualité traduit celle qui se trouve au cœur du récit, confrontant une famille vivant dans la clandestinité, constamment en fuite et donc en mouvement, et l’éveil du désir chez leur jeune fils de s’épanouir de manière plus conforme et sédentarisée.
Léonie et Eugénie mangent des huitres dans Un été comme ça
Rayon vert

« Un été comme ça » de Denis Côté : Anti-thérapie

26 juillet 2022
Au sein d’un paysage cinématographique constellé de films de deuil et de réparation, Un été comme ça de Denis Côté abandonne toute volonté de jouer les thérapeutes. Le récit se donne pleinement les moyens d’explorer le territoire des pulsions sexuelles pour mieux les comprendre.
Larry Murphy (Peter Strauss) gagne une course dans The Jericho Mile
Histoires de spectateurs

« The Jericho Mile » de Michael Mann : Le génie mannien de la mélancolie

24 juillet 2022
Michael Mann filme la solitude d’hommes, partagés par leurs tâches à accomplir et l’impossibilité pour eux de l’allier à une existence normale. Des hommes qui apprennent le métier de vivre, disait Pavese. S’agit-il pour autant d’y voir simplement la thématique du professionnalisme malade, de personnages n’ayant plus de prises sur le monde comme insiste Jean-Baptiste Thoret, Michael Mann poussant sans doute cette thématique plus loin quand ses acteurs sembleraient sortir d’un film d’Hawks, montrant l’inanité, la vacuité de leur professionnalisme ? L’absolue maîtrise de leur art pour ne mener nulle part ? Tant de professionnalisme pour rien, Michael Mann filme sûrement le vide absolu de l’action, mais non pas pour en dire l’inutile mais la vacuité sur le plan existentiel. En Amérique, si agir n’est plus la garantie d’un épanouissement personnel, quand c’était encore le cas chez Hawks, c’est surtout le produit d’une mélancolie à l’horizon indépassable. Voici donc le programme exposé, pour partie, dès son premier film, The Jericho Mile, en 1979 : la mélancolie, c’est la maladie du fait d’être homme.
Le jeune instituteur assis à coté de la chanteuse du village dans L'école au bout du monde
Rayon vert

« L'école du bout du monde » de Pawo Choyning Dorji : Trouver sa voix

22 juillet 2022
L'école du bout du monde de Pawo Choyning Dorji présente Ugyen comme une voix et l'écoute comme rapport au monde et aux personnages. Si le jeune instituteur cherche sa voie, c'est d'abord par le biais de sa propre voix. En retravaillant complètement le cliché de l'utilisation de la musique à des fins de rupture narrative et émotionnelle, le film constitue un contre-exemple où le chant occupe une place centrale dans l'évolution du personnage et son ouverture à de nouveaux possibles.
Yūsuke (Hidetoshi Nishijima) conduit par Misaki (Tōko Miura) dans Drive My Car
Rayon vert

« Drive My Car » de Ryūsuke Hamaguchi : La vie, malgré tout

18 juillet 2022
Que fait-on de ses morts ? Comment faire son deuil ? Drive My Car de Ryūsuke Hamaguchi, offre une réflexion sur ce jour maudit où chacun apprend la vérité des choses, la mort des roses.
Marguerite Duras et la critique : la romancière en train de lire
Esthétique

Critiques de la raison critique : Quand le vert de la terre

14 juillet 2022
Il y a des textes qui ont pour la question critique une valeur programmatique, d’autres sont des pragmatiques qui sacrifient à l’autobiographie. Les uns proposent une phénoménologie du spectateur doublée d’une éthique du spectateur critique, les autres exposent les écritures nécessaires à plonger dans la nuit avant la sortie au jour dans la garde persévérante de l’ombre. Il y a des textes qui situent les enjeux et s’ils sont des jeux de langage, ils sont aussi plus que cela, immunisés contre la tentation de la critique critique. Les lire c’est en accepter la question, c’est consentir à la faire sienne en répondant aux dérangements qu’ils provoquent, qui sont des déplacements sans lesquels la critique n’aurait rien à dire. La critique a des gestes et des actes qui sont des engagements, quoi qu’il en coûte. Les uns composent avec des silences qui sont des retranchements polémiques, les autres avec des secrets indiquant l’amour du cinéma, qui est le partage d’une expérience, celle d’un rapport au monde dont l’écriture est garante. Une manière d’être dont la mélancolie est tantôt visionnaire, tantôt anarchiste.
Peter von Kant filme son amant Amir
Rayon vert

« Peter von Kant » de François Ozon : Marre du cinéma

13 juillet 2022
En revisitant Les Larmes amères de Petra von Kant de Fassbinder, François Ozon laisse libre cours à son "troll" intérieur, adressant au passage un ostensible doigt d'honneur au cinéma. Sous le vernis d'une adaptation libre mais appliquée, plus théâtreuse que théâtrale, le "gendre idéal" du cinéma d'auteur contemporain laisse doucement instiller son venin jusqu'à un spectaculaire "pétage de câble", avant de revenir à la consensualité qui le caractérise en apparence.
Tori et Lokita face au Cuistot
Critique

« Tori et Lokita » de Jean-Pierre et Luc Dardenne : Mécanique de l’écrasement

11 juillet 2022
Avec Tori et Lokita, les frères Dardenne s'essaient au film coup-de-poing et plongent leur personnage principal, la pauvre Lokita, dans un tourbillon d'humiliations en tous genres dont le spectacle mécanique et métronomique ne peut conduire qu'à l'écrasement pur et simple de ce personnage sacrificiel. Si une piste est envisagée vers un salut possible, vers une dignité retrouvée, par l'intermédiaire de l'enfant sorcier Tori, la volonté unilatérale des Dardenne de faire de Lokita un "exemple" ne permet pas à cette piste-là de dépasser l'esquisse, et la porte entrouverte est bien vite refermée.
Buzz l'éclair, le jouet de Pixar
Critique

« Buzz l’éclair » : Pixar et la culture du navet

9 juillet 2022
Sorte de produit dérivé hybride, film inspiré d'un jouet tiré d'un film, « Buzz l’éclair » marque l'entrée de Pixar dans l'ère du pastiche, voire même du "navet" conscient de lui-même, comme en témoignerait un étrange dialogue inaugural. Tout, dans cet étrange produit, est en tout cas rompu au système Pixar et au fonctionnement de la machine Disney, qui semble avoir ainsi érigé l'autoparodie au rang d'art.
Alfredo et Afonso rejouent un tableau de Rubens dans "Feu Follet"
BRIFF

« Feu follet » de João Pedro Rodrigues : L’arbre et le phallus

9 juillet 2022
À travers une rêverie musicale et la fable d'un roi sans couronne qui veut devenir pompier pour protéger les arbres, João Pedro Rodrigues établit dans Feu Follet un lien entre une communion sexuelle et une communion avec la nature, avec comme ciment l'amitié et des images fortes comme autant d'allégories visuelles et textuelles auxquelles peut se raccrocher un spectateur invité à contempler cette fantaisie sexuelle et écologique flamboyante, comme un spectacle à la fois ouvert au monde et circonscrit à la forme donnée par son auteur.
Seth métamorphosé à la fin de "La Mouche"
Esthétique

Le corps, ses organes, son dehors : Sur trois fins de David Cronenberg

7 juillet 2022
Le cinéma de David Cronenberg a pour propension les organes et la débandade de leur organisation. La débandade des organes, la Bérézina des organisations, la morbidité des organismes : une foire aux atrocités dans les rapports de voracité de l'organique et de l'inorganique. Les organes prolifèrent, les organismes sont excédés, les organisations se délitent. Il y a pourtant un rêve qui se dépose à la fin des plus grands films, Videodrome (1982), La Mouche (1986) et Le Festin nu (1991). Ceux-là accueillent, avec la mort des accidentés de la technique, ces camés de la prothèse, ces toxicos de la machine qui sont des paranos de ses machinations, la libération d'un autre corps : le corps sans organes. Quand le corps sans organe est la mort, la vie du cinéma compose avec la décomposition des organes.
Des habitants du village polonais des images d'archives dans Three Minutes : A Lengthening
BRIFF

« Three Minutes : A Lengthening » de Bianca Stigter : Véracité d'une archive

5 juillet 2022
Avec Three Minutes : A Lengthening, Bianca Stigter apporte sa pierre à l'édifice de la très longue histoire de la représentation de la Shoah au cinéma. En travaillant uniquement au départ de trois minutes d'archives sur lesquelles se superposent des témoignages, elle fait se rencontrer deux traditions de pensée généralement opposées.
Carmen (Aline Küppenheim) dans la poterie au début de 1976
BRIFF

« 1976 » de Manuela Martelli : Petite histoire d'une seconde chance

4 juillet 2022
En faisant revivre le spectre d'une grand-mère partie trop tôt, 1976 est porté par un refus de la fatalité et de la tristesse. Loin de toute démonstration de force, Manuela Martelli, sous l'influence de Chantal Akerman, fait le choix d'une certaine forme de minimalisme pour raconter son histoire de seconde chance.
Neil Bennett (Tim Roth) prend le soleil sur la plage dans Sundown
BRIFF

« Sundown » : Interview de Michel Franco

2 juillet 2022
De passage à Bruxelles pour la cinquième édition du BRIFF, Michel Franco présentait Sundown, qui est peut-être, avec Chronic, son film le plus doux et le plus abouti.
Les enquêteurs de "La Nuit du 12"
BRIFF

« La Nuit du 12 » : Interview de Dominik Moll

1 juillet 2022
Dans « La Nuit du 12 », Dominik Moll s'empare du genre "piégé" de l'enquête policière et confère à la figure du policier une dimension quasi mythologique de passeur ou de réceptacle d'émotions. Son passage à Bruxelles, lors du BRIFF, était l'occasion pour nous de décrypter et d'analyser avec lui ce film, ainsi que de revenir sur l'ensemble de son œuvre et des obsessions qui la nourrissent : de la hantise au mal en passant par l'animalité.
Kiril dans la forêt dans Une bosse dans le cœur
BRIFF

« Une bosse dans le cœur » de Noé Reutenauer : Un miroir comme un autre

30 juin 2022
Avec Une bosse dans le cœur, Noé Reutenauer réussit avec brio un film sur la trisomie où il tend un miroir au spectateur qui pourra réfléchir sur les fondements de sa propre existence. La notion d'humanité peut alors être comparée à un grand puzzle dont chacun recolle les morceaux à sa façon. Nous avons tous des bosses dans le cœur, logées quelque part au croisement du réel, des rêves et de la spectralité.
Richard Dormer en pleine action sous la pluie dans 11 minutes
Rayon vert

« 11 minutes » de Jerzy Skolimowski : Ballet mécanique

26 juin 2022
11 minutes tient de l’exploit quasi-sportif en réussissant à tailler en 81 minutes chrono un cristal de situations hétérogènes tournoyant autour de la même unité de lieu (un quartier du centre de Varsovie) et de temps (les 11 premières minutes de la 17ème heure d’une journée). Le maître horloger jette toutefois sur son mécano néo-baroque un drôle de regard. La misanthropie est la tâche dans l’œil noir du démiurge, ce précurseur sombre des catastrophes annoncées dont le brio est le doigt qui, même s’il est d’honneur, s’y enfourne jusqu’au bras.
Jean-Louis Comolli, critique de cinéma et cinéaste
Esthétique

Sans compter Jean-Louis Comolli : Cinéma documentaire, cinéma minoritaire, cinéma contraire

20 juin 2022
Jean-Louis Comolli : revenir à nous en revenant à lui. Son œuvre est immense, on a de quoi travailler en continuant à dialoguer. Six décennies de cinéma, plus d’une cinquantaine de films tournés, une quinzaine de livres publiés, plus d’un millier d’articles à lire et relire. Si l’avenir est aux fantômes, le cinéma en a aussi – dans l’amitié des revenants sans compter.
Batman (Robert Pattinson) embrassant Catwoman (Zoë Kravitz) sur le toit d'un immeuble de Gotham dans The Batman
Le Majeur en crise

« The Batman » de Matt Reeves : L’opium du populisme

16 juin 2022
The Batman de Matt Reeves (2022) procède d’un discours jamais fatigué de se frayer un chemin à travers ses certitudes. Si par un hasard du calendrier il est sorti en salles un peu avant le premier tour des élections présidentielles en France, The Batman était toutefois parfaitement synchrone d’une bonne partie des débats avec leurs petites philosophies politiques rances de l’époque sur les enjeux sécuritaires comme la corruption des élites. Un discours non pas simplement local, mais un discours-monde, aux dimensions de Gotham City. Un discours auquel tous les bénis non-non se rallieront, semence à laquelle il faudrait opposer la semonce du coup de canon.
Vincent Gallo luttant pour sa survie dans la forêt dans Essential Killing
Interview

« Essential Killing » de Jerzy Skolimowski : La bannière détoilée

12 juin 2022
Naître au monde. Mais dénaître ? Jerzy Skolimowski en fixe le programme politico-existentiel dans Essential Killing, qui est autant un acte de soumission - quand un État sous couvert de lutter contre le terrorisme néantise l'homme en le faisant dénaître de son vivant -, qu'un acte d'insurrection - lorsque le paria s'efforce jusqu'au dernier sommeil à la sortie de son anéantissement. Le texte est suivi d'une interview du cinéaste exhumée du grenier du Rayon Vert.
Alain Chabat et Léa Drucker explique leur incroyable histoire dans Incroyable mais vrai
Critique

« Incroyable mais vrai » : Quentin Dupieux et une certaine idée de l'enfer

11 juin 2022
Il n'est pas toujours facile pour le spectateur d'habiter le monde dantesque de Quentin Dupieux. Le cinéaste se montre intransigeant, radical, et sa vision de l'enfer terrestre constitue, dans toute sa cohérence, une œuvre à part. Enfer et folie, tel est encore le programme d'Incroyable mais vrai qui, dans le même temps, peut être vu comme un film un peu moralisateur.
Les chef de brigade de Top Chef 2022
Esthétique

« Top Chef » : L'épure, l'ascèse et l'enfant (ou un trou dans la boîte noire) 

10 juin 2022
Enfant de la télévision et du cinéma n'appartenant vraiment ni à l'un ni à l'autre, Top Chef continue à exercer sur nous son pouvoir de fascination. Examen d'un programme aussi radical (dans son écriture, notamment) qu'ambitieux qui ne dit pas son nom. La télé que nous méritons, aujourd'hui. Un texte écrit à quatre mains sous la forme d'un abécédaire avec Mathias De Smet.
Laurent (Rahim) et "la" femme (Efira) dans "Don Juan"
Critique

« Don Juan » de Serge Bozon : Le charme de l’imperfection

7 juin 2022
Dans le Don Juan de Serge Bozon, le Don Juan du titre ne séduit pas toutes les femmes mais une seule femme à travers toutes. Une idée évanescente de la figure mythique de Don Juan s'en dégage et donne au film sa saveur particulière, fondue dans un moule de comédie vaguement musicale. C'est de la fragilité de sa forme que Don Juan tire paradoxalement sa force, tout en restant un film difficile à appréhender, dont l'équilibre instable fait néanmoins le charme.
Alice (Ludivine Sagnier) voit Lou à son école dans La Ruche
Critique

« La Ruche » de Christophe Hermans : Le pesticide des clichés

5 juin 2022
C'est le devoir de la critique de mener encore certains combats, et un des nôtres consiste à riposter contre le formatage du cinéma d'auteur belge francophone et international fondu dans un moule psychologico-réaliste. La Ruche de Christophe Hermans en constitue un énième exemple déprimant : on en peut plus de voir ces corps à la dérive s'égratigner entre eux et rechercher une fausse grâce sur le son d'une danse exaltée. Cinéma de l'étouffement où les clichés et les dialogues lourdingues agissent comme un pesticide.
Alice (Marion Cotillard) en larmes dans Frère et Sœur
Critique

« Frère et Sœur » d'Arnaud Desplechin : Malin génie

2 juin 2022
Il y a des rancœurs qui ont le génie pour enjeu et sa reconnaissance disputée fait le sel des existences jetées dans la bataille érigeant l’hystérie familiale en l’épopée chérie des rivalités artistiques. Énième chapitre offert à la réécriture de son roman familial en cinéma, Frère et sœur d’Arnaud Desplechin sale outrageusement son goût du romanesque parce qu’il n’en ignore pas l’affadissement suite aux remâchements du style. L’auteur fait le tour du propriétaire de son royaume et si le génie y est roi, il s’agit d’un malin génie. En s’accaparant la part du lion taillée sur le dos de tout et tous, personnages et références, le malin génie impose que la reconnaissance, si elle part de lui, doit à la fin lui revenir. Dans ces affaires, on n’est jamais mieux servi que par soi-même, le maître étant pour lui-même son plus zélé valet.
Michelle Yeoh utilisant ses pouvoirs dans Everything Everywhere All At Once
Le Majeur en crise

« Everything Everywhere All At Once » : Se laisser toucher par les doigts hot dog

2 juin 2022
Everything Everywhere All At Once remplit à première vue toutes les cases d'un divertissement au rythme effréné jouant avec les codes du film d’action. Dans ce type de film, faire advenir une véritable émotion se révèle assez difficile, tout étant directement désamorcé par l’aspect parodique et le second degré omniprésent. Le film de Daniel Kwan et Daniel Scheinert s’essaie pourtant à l’exercice d’une manière inattendue, en retournant l’une de ses séquences clés contre elle-même ; comme si le film faisait le pari de pouvoir inverser un instant les registres, du potache à l’émotion, par la seule force de ses propres images.
Oscar Isaac en train d'écrire dans The Card Counter (Critique)
Esthétique

De l’acte critique comme expérience spectatorielle

30 mai 2022
Écrire ne sera jamais neutre. Mettre en voie cette mécanique de la main, mettre en joute cette mélancolie, ce renoncement à une science du cinéma qui énoncerait le bien autant que le vrai. Penser une agonistique, vaste logomachie au cœur de l’espace critique où s’affrontent des discours pour établir des hiérarchies. Ensauvager l’analyse par ma seule présence de spectateur. Prendre position, agir en primitif au sein du Rayon Vert, comme une manière de ne jamais cesser de tourner dans mes questions : penser mon rapport au cinéma, une façon d’être au monde.
Saul Tenser (Mortensen) entre sa compagne Caprice (Seydoux) et son admiratrice Timlin (Stewart) dans « Crimes of the Future »
Rayon vert

« Crimes of the Future » de David Cronenberg : Hybride évolution

24 mai 2022
Dans son nouveau film attendu comme le Messie, David Cronenberg parvient à la fois à combler des attentes et à se montrer déceptif. C'est en faisant se rencontrer deux pans de son cinéma qu'il le fait évoluer, en faisant d'un film hybride une nouvelle étape, un « troisième type » . Tout comme l'humanité accède à un stade supérieur d'évolution à la fin de Crimes of the Future, c'est par une démarche d'hybridation, par le composite, que le cinéma de Cronenberg continue d'évoluer.
Harper (Jessie Buckley) dans le tunnel dans la forêt dans Men
Critique

« Men » de Alex Garland : Le mâle engendre le mâle

22 mai 2022
Alex Garland signe avec Men un troisième film retors et un peu lourdingue qui surfe sur la vague des films post-MeToo tout en évitant in extremis la caricature totale grâce à un travail fantasmagorique sur la question du deuil. Néanmoins, plutôt qu’une grande allégorie féministe, le film pourrait être vu aussi comme une critique de ce que cette « ère » a pu engendrer comme atmosphère de peur constante, de méfiance voire de détestation entre les femmes et les hommes.
Des acteurs dans Le cinéma de Noël Herpe
Esthétique

Modernité anachronique et renaissance contemporaine : Noël Herpe cinéaste

20 mai 2022
La Tour de Nesle, troisième film et second long métrage de Noël Herpe, est sorti en DVD en avril, édité par Tamasa, et sera diffusé à partir de juin sur Ciné +. Cette sortie, succédant à l'exploitation du film en salles ainsi qu'à celle du documentaire Noël et sa mère (réalisé par Arthur Dreyfus, son ami et complice, rétrospection intime d'une enfance et de souvenirs mêlés avec sa mère), participe ce printemps à une certaine actualité du travail cinématographique herpien. Il m'a semblé intéressant de revenir sur ce travail, composé de trois films - le court métrage C'est l'Homme (2009), les deux longs métrages Fantasmes et fantômes (2018) et La Tour de Nesle (2021).
Pearl (Mia Goth), la vieille femme de X
Critique

« X » de Ti West : Proposition décente

17 mai 2022
X de Ti West se situe sur le plan du désir. La vengeance froide et puritaine propre aux grandes figures du slasher laisse place à un jeu autour de la sexualité. Le sang finira certes par couler (loi du genre oblige !), et c'est un peu dommage qu'il le fasse de manière très classique, mais le film restera une affaire de sexe qui repose au fond sur une proposition décente, une volonté de désirer encore.
Dieter Dengler dans la jungle dans Petit Dieter doit voler
Rayon vert

« Petit Dieter doit voler » de Werner Herzog : Qui témoigne pour le témoin, sinon l’ami ?

14 mai 2022
La survie, c’est la vie vécue à l’extrême pointe, extrémisée par la proximité de la mort jusqu’à ses limites dont le franchissement est un anéantissement. Le survivant vit en témoignant, le vivant témoigne en parlant comme en ne parlant pas. Quand il est silencieux, le témoin est taiseux et ses silences témoignent pour lui. Le vivant qui a survécu en a-t-il à jamais fini avec la survie ? Dieter Dengler est un témoin : l'homme qui a survécu au pire parle à Werner Herzog qui lui dédie Petit Dieter doit voler (1997). L’homme qui témoigne en faisant preuve d'une extraordinaire prolixité tourne cependant autour d'un noyau d'indicible, un reste irracontable : son désir de voler a eu pour fondation et destination une destruction réitérée. Le témoin est un derviche tourneur dont l’axe de rotation est ce reste-là. Avec l’homme témoignant pour l’ami absent et l'autre ami qui témoigne pour lui en lui dédiant son film, la vie apparaît enfin pour ce qu'elle est en vérité : l'énigme extatique d’un miracle inespéré.
Gellert Grindelwald (Mads Mikkelsen) dans la scène finale de Les Animaux Fantastiques : Les secrets de Dumbledore
Esthétique

« Les Animaux fantastiques : Les Secrets de Dumbledore » : De l'élémantal élémentaire

12 mai 2022
Plutôt mal-aimé, Les Secrets de Dumbledore, le troisième volet des Animaux fantastiques, tourne néanmoins autour de bien jolies choses : astrologie, quatre éléments, surface, publicité, trains (entre autres). Ou : brève et forcément lacunaire histoire de la surface élémentaire, et de l'incorruptibilité de l'air, en partant d'un (beau) dernier plan.
Anne (Anamaria Vartolomei) danse dans un bar dans L'évènement
Critique

« L’Événement » d’Audrey Diwan : Venger sa race, manger sa classe ?

9 mai 2022
Audrey Diwan, compagne à la ville de Cédric Jimenez, aurait-elle réalisé un film de droite à tendance libérale avec L’Événement (2021), à l’instar du regrettable Bac Nord ? Ou comment un certain cinéma, après avoir opéré son tournant sécuritaire, promeut la logique de la libre entreprise de soi au pays de la macronie.
Chiara (Swamy Rotolo) à la recherche de son père dans la brume dans A Chiara
Rayon vert

« A Chiara » de Jonas Carpignano : Le deuil des vivants

6 mai 2022
Avec A Chiara, Jonas Carpignano filme le travail de deuil des vivants. Le deuil n'est en effet pas qu'une relation qui nous lie à nos morts, il charpente nos vies où les vivants, eux aussi, passent comme des fantômes qu'il faut oublier : dans A Chiara, il faudra affronter la perte du père et d'une famille unie relativement insouciante.
Kyoko dans Antiporno
Esthétique

« Antiporno » de Sono Sion : Repenser le Roman Porno

4 mai 2022
En 2015, la société de production Nikkatsu propose à des réalisateurs reconnus de réaliser leur propre Roman Porno. Parmi ceux-là, Sono Sion a décidé de s'emparer de ce genre issu des années 70 et dans lequel transparaissait souvent un message politique fort, pour mieux en subvertir et mettre en évidence l'une des tares les plus évidentes, à savoir une misogynie latente voire exacerbée. Dans Antiporno, Sono Sion s'empare donc du Roman Porno pour travailler la question du genre et se sert de la mise en abyme pour mener à bien une réflexion sur le corps et la sexualité féminine.
Médéric (Jean-Charles Clichet) aborde Isadora (Noémie Lvovsky) dans la scène d'ouverture de Viens je t'emmène
Interview

Interview d'Alain Guiraudie pour « Viens je t'emmène »

1 mai 2022
Avec Viens je t'emmène, Alain Guiraudie signe un film léger et retrouve l'humour si décapant qui caractérise son œuvre. Il s'intéresse cette fois-ci au spectre de la menace du terrorisme islamique et à la place qu'elle occupe dans nos imaginaires tout en en filmant, comme à son habitude, les puissances et les contrariétés du désir. Nous avons rencontré un cinéaste généreux pour une longue interview où nous revenons en détails sur différents aspects du film et de son œuvre en général.
Jean-Louis Trintignant est Silence dans Le Grand Silence
Esthétique

« Le Grand Silence » de Sergio Corbucci : La violence à froid

22 avril 2022
Le Grand Silence est un sommet du western italien, noir sur fond blanc. La violence y éclate à froid en recourant à la règle qui la justifie. C'est que la loi s'impose à la violence mimétique en y participant quand le droit a besoin d'être suppléé par la loi du marché. Les montagnes enneigées exposent ainsi la surface blanche où s'écrivent les faux raccords du monopole de la violence légitime. Ce monde-là, qui est la fin du western, a été un climax de barbarie. Pour en témoigner, rien de plus approprié que la barbarisation du genre lui-même. La profanation du western a pour vérité les mains mutilées par l'exercice de la pulsion qui s'habille toujours de la règle, jouant l'une contre l'autre pour surenchérir sur la loi et ses apories, y compris celles du genre disséqué comme un cadavre à la morgue.
Natsuko et Aya se rencontrent dans la troisième histoire de « Contes du hasard et autres fantaisies »
Rayon vert

« Contes du hasard et autres fantaisies » de Ryūsuke Hamaguchi : Quiproquos et épiphanies

18 avril 2022
Avec ces Contes du hasard et autres fantaisies, Ryūsuke Hamaguchi convoque des influences comme celles de Hong Sang-soo ou d’Éric Rohmer et fait dialoguer entre elles ses trois histoires, ses trois « nouvelles », autour des figures du quiproquo, du triangle amoureux et de l’épiphanie, faisant ainsi de la plus belle des manières du boulevardier quiproquo un vecteur d’épiphanie et de clarté de vue pour les personnages et pour le spectateur.
Dario Argento et Françoise Lebrun s'enlacent dans Vortex
Critique

« Vortex » de Gaspar Noé : Aïe, dégueu

16 avril 2022
Dans Irréversible, un violeur surnommé le Ténia était à chercher là où le parasite se terrait, dans le dédale intestinal d'une boîte de nuit qui s'appelait le Rectum. Aussi épais soit-il, le gag est à prendre très au sérieux, en étant le noyau d'une vision du monde infernale et puérile dont le cercle conjoint l'adolescence à la sénescence. Avec Vortex, Gaspar Noé assume jusqu’au bout, il faut lui reconnaître son jusqu’au-boutisme : le rectum il y est et il ne tient pas spécialement à en sortir, le ténia bien au chaud, lové dans le boyau du cinéma, ce corps en tant qu'il est mort et dont l'adoration cinéphile tient lieu d'exercice thanatopraxique.
Des réfugiés congolais se protègent des bombes dans L'Empire du silence
Critique

« L'Empire du silence » de Thierry Michel : Bouteille à la terre

12 avril 2022
L'Empire du silence est né d'une colère, celle du silence de la communauté internationale sur la situation toujours chaotique en République démocratique du Congo. Mais cet empire du silence s'étend métaphoriquement sur plusieurs niveaux de sens. C'est la règle d'or d'un pays qui ne cesse de manipuler et d'effacer les traces des atrocités commises dans son histoire, une histoire écrite par les gagnants contre laquelle chaque contre-image, aussi atroce soit-elle, compte. C'est aussi le silence des forêts et du fleuve Congo, deux géants ténébreux qui portent les croyances et la mémoire funeste de tout un pays.
Gene Tierney et George Sanders dans The Ghost and Mrs. Muir
Rayon vert

« The Ghost and Mrs. Muir » de Joseph L. Mankiewicz : Une aventure du regard

9 avril 2022
The Ghost and Mrs. Muir de Joseph L. Mankiewicz tisse avec une grande puissance évocatrice des passages entre plusieurs mondes : rêve et réalité, vie et mort, pesanteur terrestre et éclat des vagues. Mais quel est le moment où le récit bascule et pénètre l’autre monde ? La réponse se trouve peut-être au bout d’un travelling.
Joan Fontaine et Louis Jourdan font connaissance dans Lettre d'une inconnue
Rayon vert

« Lettre d’une inconnue » de Max Ophuls : Le manège des simulacres et l'instance qui l'arrête

3 avril 2022
Les plus beaux personnages de Max Ophuls sont des séducteurs piégés par l'ivresse circulaire des plaisirs de la séduction, les prisonniers volontaires de la vie qui est un théâtre d'ombres, un manège, une ronde de simulacres. Faire tomber le masque n'intéresse pas Max Ophuls parce que derrière le masque il n'y a rien. Le masque est la vérité cachée du masque, vérité circulaire comme une ronde, un manège. Quand le masque tombe, la vie n'est pas plus véridique, elle est seulement plus lourde, c'est la vie qui tombe, qui s'arrête comme une toupie. Lettre d'une inconnue est l'histoire d'un homme qui a vécu sa vie comme un rêve et d'une femme dont la mort lui signifie que le rêve est fini. Quand un homme jouit du manège de la vie avec une inconstance qui est aussi la plus grande inconscience, une femme lui rappelle que la vie est tragique. Voilà ce qui reste troublant ici, et à jamais saisissant : un homme a de l'avance sur une femme avant de découvrir qu'elle aura le dernier mot sur sa vie, celui de la mort.
Les 4 policiers (Álex García, Hovik Keuchkerian, Patrick Criado, Roberto Álamo) dans Antidisturbios
Critique

« Antidisturbios » de Rodrigo Sorogoyen et Isabel Peña : Le silence des bourreaux

30 mars 2022
Antidisturbios est une mini-série qui devrait être regardée en mode split screen, par écran interposé, comparativement au documentaire de David Dufresne, Un pays qui se tient sage, sorti sur les écrans en 2020, la même année que la série. Un film documentaire, une série de fiction partageant un intérêt commun pour la question/la gestion des violences policières, l’époque aidant, mais en une approche radicalement différente : quand le documentaire de David Dufresne donne le sentiment de tenir les coupables de cette violence (pour le dire massivement, une police qui ne serait plus républicaine mais gardienne des seules valeurs de la bourgeoisie), la circonscrivant l’enfermant dans sa caméra-vérité mais l’appauvrissant ce faisant, cette violence, au contraire, dans la mini-série, ne cessant jamais de circuler ni de s’échanger entre les protagonistes, effacerait le crime comme la possibilité d’enquêter, le monde entier, l’enquêteur lui-même, le spectateur, tous responsables d’une violence dont la bavure policière ne serait que l’extrême pointe.
Hélène (Vicky Krieps) et Fernand (Vincent Lacoste) marchent dans la rue dans De nos frères blessés
Critique

« De nos frères blessés » de Hélier Cisterne : Celui qui n'a pas trahi, celui-là a été trahi

26 mars 2022
La rengaine entonnée par De nos frères blessés est sur-entendue : la grande histoire par le petit bout de la lorgnette, les faits à hauteur de l'humain, l'affaire des personnes plutôt que celle des forces impersonnelles. Destituer les majuscules de l'histoire au nom des petites généricités de l'intimité reste une opération consensuelle, favorable à toutes les réductions, toutes les trahisons. Entonner la rengaine du petit bout de la lorgnette comme s'y prête Hélier Cisterne, c'est entamer les paroles d'une chanson connue, celle des amours plus transparentes que les engagements politiques. C'est aussi déclamer à la cantonade qu'il y a des justes qui le sont moins pour des idées que par vertu. C'est encore verser dans le gros tonneau du cinéma français la vie de Fernand Iveton, vie d'exception et d'exemplarité tristement passée au laminoir de rassembleuses banalités.
L'affiche de Des mots qui restent
Rayon vert

« Des mots qui restent » de Nurith Aviv : La condition brisée des langues

19 mars 2022
De film en film, Nurith Aviv ne cesse pas de tourner dans les mêmes questions autour de ce qui fait une langue, en atteste son dernier moyen-métrage Des mots qui restent. Un choix qui pourrait apparaître monomaniaque, y compris dans son dispositif filmique, composé le plus souvent à partir d’entretiens en plans fixes, mais qui par sa rectitude diffracte au contraire le champ des possibles, en montrant combien la relation (à l’autre, aux images, aux langues, aux récits) est au cœur de son sujet comme de sa mise en scène.