La peinture est invivable. C’est ainsi que tend la main au peintre consacré après sa mort un cinéaste ayant vécu, comme une balle logée dans le ventre, la blessure originelle de la peinture abandonnée. L’homme du ressentiment est celui d’une demande de reconnaissance impossible à satisfaire parce qu’elle est le fruit d’une blessure qui jamais ne cesse de suppurer. Le ressentiment est le moment du négatif mais il s’agit pourtant d’en tirer une énergie créatrice. Le vitalisme peut ainsi rédimer le ressentiment quand il tient tant à la vie, toute la vie, y compris ses lacunes, ses défauts et ses béances, sachant que le mal est fait autant que l’amour existe. Avec Maurice Pialat, j’ai mal donc j’existe et mourir consiste à en avoir fini avec la douleur de vivre. La peinture est invivable, on n’en vit pas mais c’est avec elle qu’il faut tenter de vivre. Van Gogh s’approprie les derniers jours de la vie du peintre à partir du faisceau des douleurs logées dans son ventre, existentielles, artistiques et historiques, douleurs des frères que l’art et son commerce opposent, des rivalités recuites comme d’un pays hanté par des violences fratricides.