La survie, c’est la vie vécue à l’extrême pointe, extrémisée par la proximité de la mort jusqu’à ses limites dont le franchissement est un anéantissement. Le survivant vit en témoignant, le vivant témoigne en parlant comme en ne parlant pas. Quand il est silencieux, le témoin est taiseux et ses silences témoignent pour lui. Le vivant qui a survécu en a-t-il à jamais fini avec la survie ? Dieter Dengler est un témoin : l'homme qui a survécu au pire parle à Werner Herzog qui lui dédie Petit Dieter doit voler (1997). L’homme qui témoigne en faisant preuve d'une extraordinaire prolixité tourne cependant autour d'un noyau d'indicible, un reste irracontable : son désir de voler a eu pour fondation et destination une destruction réitérée. Le témoin est un derviche tourneur dont l’axe de rotation est ce reste-là. Avec l’homme témoignant pour l’ami absent et l'autre ami qui témoigne pour lui en lui dédiant son film, la vie apparaît enfin pour ce qu'elle est en vérité : l'énigme extatique d’un miracle inespéré.