Chez Martin Scorsese, on se distingue en ceci, surtout, que la tragédie consiste dans le fait d'avoir renoncé – à quoi, sinon s'obstiner à occuper une position d'exception héroïque, intenable à la fin ?
Renoncer qualifie la fêlure de celui qui accepte de ne plus tenir un point d'exception, son héroïsme de moins en moins assumable (la schizophrénie, toujours, menace). Et la fêlure tragique de qui a consenti à renoncer aura pris une grande variété d'expression dans les films de Martin Scorsese.
Ainsi, le premier de ses incontestables chefs-d'œuvre, Raging Bull (1980), représente ce moment décisif où la fiction, inspirée par la trajectoire biographique du boxeur Jake LaMotta, dépose l'allégorie caractérisant la situation même du cinéaste, qui n'a plus cessé depuis de reconnaître, dans le destin de ses figures brisées, le sien propre.
Le renoncement est un martyr et sa déposition, une allégorie – les martyrs de « Marty » Scorsese.