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Jim et Karim Leklou dans Le Roman de Jim des frères Larrieu
Interview

« Le Roman de Jim » : Interview d'Arnaud et Jean-Marie Larrieu

Thibaut Grégoire
Situé quelque part dans un nouage entre le réalisme, le désir et l'onirisme, le travail d'Arnaud et Jean-Marie Larrieu nous a toujours intéressé par sa singularité. C'est pourquoi leur venue en juin dernier au BRIFF à Bruxelles était l'occasion de discuter avec eux de leur dernier film, Le Roman de Jim, et de le mettre en dialogue avec leurs films précédents. Portant notamment sur le travail d'adaptation, sur la métamorphose, la figure de l'épiphanie ou encore la rencontre du trivial et de la grâce, la discussion dévia aussi sur l'opposition de leur démarche avec celles d'autres réalisateurs. La rencontre s'est agrémentée d'une autre, avec le comédien Karmi Leklou, qui nous aura également éclairé sur le film et sur son propre rapport au travail d'acteur et au cinéma.
Thibaut Grégoire

« Le Roman de Jim », un film d'Arnaud et Jean-Marie Larrieu (2024)

Après son succès critique au Festival de Cannes où beaucoup s'étaient demandés pourquoi il ne figurait pas en compétition, Le Roman de Jim, neuvième film d'Arnaud et Jean-Marie Larrieu, était présenté au Brussels International Film Festival (BRIFF), avant de sortir en salles le 14 août. L'occasion était idéale de rencontrer un duo dont nous avons toujours aimé la singularité du travail, situé quelque part dans un nouage entre le réalisme, le désir et l'onirisme, creusant le même sillon qu'Alain Guiraudie ou Bruno Dumont. Les frères Larrieu font ainsi partie des cinéastes français les plus importants en activité. Ils nous parlent ici de la manière dont ils conçoivent un territoire d'enfance, le sacré ou la métamorphose.

Une deuxième interview avec Karim Leklou, acteur principal du Roman de Jim, accompagne ci-dessous cette rencontre.
 


 

Qu'est-ce qui vous a intéressé dans le roman de Pierric Bailly dont est adapté Le Roman de Jim ? Il y a quelque chose de plus classique et de plus linéaire par rapport à vos autres films.

De servir d'abord le propos et l'histoire du livre, mais aussi de faire face à des difficultés auxquelles nous ne nous étions jamais confrontés, comme ce récit qui s'étend sur vingt-cinq ans. Le Roman de Jim est pour nous notre « film réaliste », c'est-à-dire que nous avons travaillé à partir d'éléments du quotidien mais sans jamais faire de chantage au réel ni avec le surgissement des émotions. Il nous fallait aussi obtenir de la fluidité dans la représentation du temps car les personnages évoluent énormément. Ce n'est donc pas un film naturaliste. S'il y a un genre, c'est celui du mélo. Et nous aimions beaucoup que nos personnages brisent les clichés, à l'image d'Aymeric (Karim Leklou), qui est intérimaire, travaille dans une usine et remonte dans la montagne le soir.

Il y a ainsi de nombreux éléments réalistes dans Le Roman de Jim et ça aurait pu être handicapant, comme si le quotidien était un poids. Nous pensons par exemple à la séquence du bébé avec le biberon, qui est bien différente de ce que nous avions fait auparavant dans nos recherches autour de la fantaisie-comédie. La séquence suivante se déroule un an plus tard, puis le bébé marche. C'est vraiment l'aspect éphémère du temps et du quotidien qui se ressent en premier. Au bout du compte, cela finit par provoquer une émotion. On ne perçoit pas forcément cette émotion lorsqu'on la vit au quotidien. Elle se produit lorsqu'on revient dessus, d'où l'utilisation de la voix-off qui se pose pour toute adaptation littéraire. C'est un choix qui est vite paru évident pour nous car il fallait que quelqu'un raconte son histoire et navigue dans le temps. À partir du moment où l'histoire est racontée de son point de vue, Aymeric choisit lui-même ses ellipses et la façon dont il va raconter à Jim son histoire, d'où il vient, tout autant qu'il va définir sa propre personne par rapport à ce qu'il n'est pas.

Dans vos films, il y a souvent une révélation, une épiphanie. Dans Le Roman de Jim, cela peut se traduire par le malaise qui arrive deux fois, qui est donc un choc émotionnel, ainsi que dans le rapport à la photographie et au développement du négatif. Cela produit une forme de transfiguration qui arrive souvent dans vos films.

Oui, ou la métamorphose pour prendre un autre mot. C'est vrai que lorsqu'Aymeric s'écroule à la boulangerie, cela donne la rencontre avec Olivia (Sara Giraudeau). L’épiphanie, à ce moment, est effectivement forte et déterminante. Quand nous rencontrons les financiers, ou qu'on se réfère aux habituelles leçons de scénario, ce qui revient systématiquement sur la table est le récit et le conflit, ainsi que les combats et les résolutions qui vont avec. À l'opposé, nous arrivons avec l'idée de la métamorphose et, en effet, comme dans beaucoup de nos films, Le Roman de Jim en porte une nouvelle fois la trace. Cette dimension est aussi présente dans le roman de Pierric Bailly.

Adapter un roman implique aussi ce processus de métamorphose et le passage d'un média à un autre. Comme dans le film, il faut en quelque sorte développer le négatif. Concevez-vous l'adaptation comme une métamorphose ?

Oui, mais c'est un travail en alternance. Il y a des moments où le roman vole tout et il faut le lâcher. Puis il y en a d'autres où il manque et il faut le reprendre un peu. Il y a un désir qui apparaît lorsqu'on lit une première fois le livre, indépendamment de sa faisabilité, au départ duquel on voit le personnage avec sa force romanesque. Après, le livre devient très encombrant car il se situe très loin du film. Cette distance fait qu'on finit par se retrouver soi-même en redevenant un écrivain de scénario. Ce serait drôle de voir cinq adaptations du Roman de Jim par Jacques Audiard, Alain Guiraudie, Valérie Donzelli, Maïwenn et nous. Le roman nous métamorphose et c'est à nous aussi de le métamorphoser. Il y avait aussi une complicité au départ car l'auteur voulait que nous lisions le livre. On peut dire qu'il a vu juste alors que d'autres cinéastes étaient intéressés par le projet. Il a tenu à ce que ce soit nous qui le réalisions.

Par rapport à cette idée de transfiguration, il y a toujours un personnage dans vos films qui pratique un art transfigurant son réel et son expérience. Dans Le Roman de Jim, c'est la photographie qui transforme les souvenirs ou, dans Tralala, la musique.

Pierric Bailly est très précis sur ce point. Dans Le Roman de Jim, Aymeric hérite de l'appareil photo de son père. Cela lui correspond assez bien car il se trouve souvent dans une position d'observateur et cela lui confère une contenance sociale. Finalement, ce médium lui permet de franchir une étape quand il devient photographe de mariage, ce qui est loin de lui octroyer le statut d'un photographe d'art ou autre. C'est émouvant car Aymeric, qui n'a jamais cessé de se prendre des coups, devient celui qui photographie le bonheur des autres. C'est là que le personnage trouve sa singularité : il prend des photos comme le ferait un père de famille. Dans le roman, il s'achetait un labo pour tirer des photos et on a changé cela afin qu'il travaille directement en numérique. Un rapprochement se fait entre le fait qu'Aymeric ne développe pas ses photos et sa difficulté à nouer des relations avec les autres. Il a de la place pour enregistrer les choses sans pour autant voir ce qu'il a enregistré.

Dans vos films, il y a toujours une communion et une rencontre entre quelque chose de sacré, ou relevant de la grâce, et quelque chose de trivial (comme le sexe, etc.). Comment travaillez-vous ce rapprochement ?

C'est de cette manière que la vie se donne. Le sacré n'existe pas en soi et le mettre en rapport avec le trivial permet de le comprendre à travers des moments ou des rencontres. Ce n'est pas un accès à un état supérieur qui tomberait du ciel on ne sait comment. Par exemple, les coqs, dans Un homme, un vrai, avec leur chant, acquièrent quelque chose de sacré et occupent en quelque sorte la scène primitive, et en même temps c'est très organisé par les personnages. Nous aimons bien la notion d'impureté qui se manifeste en lien avec le vivant. Le trivial récupère un peu de sacré et inversement, le sacré devient possible quand il se retrouve au contact de la vie. C'est pour ça que dans Le Roman de Jim, le fait de raconter vingt-cinq ans de vie en choisissant des moments quotidiens (et aussi plus émotionnels avec la rupture, la séparation de l'enfant, etc.) permet à ceux-ci d'accéder à une forme de sacré parce qu'ils sont éphémères et rapidement enchaînés. C'est aussi un travail sur le temps.

Tout le casting du film Le roman de Jim autour de Jim dans la montagne.
© Pyramide Distribution

Vous utilisez souvent la musique de manière intradiégétique. Elle va débloquer des choses, à nouveau en lien avec des épiphanies comme nous l'évoquions plus haut, comme par exemple le morceau "Nature Boy" dans Peindre ou faire l'amour qui va changer la relation entre les deux couples. Dans Le Roman de Jim, vous utilisez "The First Father" ou de la musique électro à la fin du film pour créer là aussi des épiphanies. Comment travaillez-vous cet aspect ?

Nous n'avons pas exactement refait ce que nous faisons toujours avec l'utilisation de la musique, parce qu'étrangement, nous avons en effet l'impression d'avoir fait quelque chose de différent tout en étant encore plus nous-mêmes (rires). Tralala nous a libéré sur le fait d'utiliser plusieurs régimes musicaux, comme l'usage intradiégétique à l'intérieur du récit, le recours à des compositeurs différents dont Bertrand Belin, qui s'occupe du côté plutôt classique de la composition, et Shane Copin. Les nuits sonores sont très proches des scènes de la boîte de nuit dans Tralala. Il y aussi toutes ces musiques que le film traverse à ses différentes époques, jusqu'à l'électro à la fin du film qui est associée à Jim. Cette dimension se trouve dans le roman et plusieurs cinéastes qui voulaient l'adapter avait un problème avec cette fin et voulaient trouver autre chose, alors que nous tenions beaucoup à respecter ce qui a été écrit.

Pourriez-vous revenir sur l'origine et l'importance pour vous de tourner à deux et entre frères ? Vous êtes un des duos pour qui cette spécificité, cette expérience familiale fondatrice, prend le plus de sens.

Il y a longtemps, quand on nous posait cette question, nous nous interrogions sur les frères Dardenne. Pourquoi se sont-ils mis à deux ? Pour tuer le père (rires). Leur rapport au père est très dur dans leurs films, il est vecteur d'une grande violence et ils devaient certainement se mettre à deux pour affronter cela. De notre côté, nous travaillons ensemble à préserver un territoire qu'on pourrait appeler celui de l'enfance, qui se retrouve dans tous nos films d'une manière ou d'une autre. Cela préserve une sorte de bulle que rien ne peut atteindre tout en créant une distance par rapport à un esprit de sérieux qui nous permet de rester joueurs et innocents. Ce qui est troublant, c'est que Pierric Bailly, qui est né dans le Jura, mais à quinze ans de différence, a senti tout de suite que nous partagions avec lui ce rapport à l'enfance. Il a vu nos films et il y a trouvé une correspondance avec son roman. Autre détail troublant : la première fois que nous avons vu le nom de Pierric, c'était sur la table d'une librairie à Paris sur laquelle était posé son livre L’Étoile du Hautacam. Le Hautacam est un petit massif montagneux assez semblable à la région où nous avons grandi. Avec ce titre, il a directement touché notre territoire d'enfance.

 


 

Interview de Karim Leklou pour « Le Roman de Jim »

Qu'est-ce qui vous a attiré dans le travail des frères Larrieu et comment avez-vous abordé le tournage ?

Ce qui m'a attiré, de manière très concrète, est le scénario. Je connaissais les frères Larrieu de réputation mais pas encore leur travail dont j'avais entendu beaucoup parler. J'ai donc d'abord été très marqué par la lecture du scénario que je trouvais universel, très profond et très émouvant. C'est un mélo mais très ancré dans le réel et le social, avec des événements forts qui bousculent les personnages. J'ai été aussi touché par le destin d’Aymeric autour de la paternité qui se déroule en plus sur plus de vingt-cinq ans, ce qui est très original. Et surtout, cette grande idée : qu'est-ce qui se passe lorsqu'on doit se séparer d'un enfant qu'on aime alors qu'on n'en est pas le père biologique ? À vrai dire, je ne savais pas si j'allais pouvoir m'insérer dans leur univers. Quand j'ai rencontré les Larrieu, cela faisait quatre mois qu'ils étaient en casting. Le soir de notre rencontre, ils m'ont proposé le rôle. Ce fût un grand oui pour moi déjà pour le scénario, puis parce que je les ai trouvé profondément touchants.

C'est la première fois que vous jouez une figure paternelle rassurante.

Oui, Aymeric est un personnage d'une grande douceur et d'une grande gentillesse que je n'ai jamais incarné auparavant. Il a aussi une grande résilience. Interpréter un personnage comme celui-là m'a permis d'aller vers quelque chose d'autre. Alors qu'à la base, j'ai parfois du mal avec certains mélos et Le Roman de Jim en est un mais il m'a touché différemment, notamment parce que Les Larrieu s'intéressent beaucoup aux autres : leur mélo ne tourne pas à vide mais s'inscrit dans le réel et la société.

Dans Le Roman de Jim, vous êtes quasiment de tous les plans. Vous portez véritablement le film et c'est une des premières fois que cela vous arrive.

Ça commence à faire quelques films maintenant où mes personnages portent le récit, comme dans Vincent doit mourir, Goutte d'or, Pour la France et Le monde est à toi. Après, effectivement, c'est la première fois où j'ai un rôle dont les traits principaux sont la gentillesse et la douceur, avec un côté un peu anglais.

De manière générale, quelles dimensions de vos personnages aimez-vous travailler en premier lieu ?

Je n'ai pas de préférence. J'aime surtout faire des films différents et des rôles qui ne se ressemblent pas. Ce métier permet de voyager dans des univers et des horizons que je n'ai pas encore explorés. Je n'ai pas un schéma de travail préétabli ou un plan de carrière.

Karim Leklou et Sara Giraudeau dans Le roman de Jim des frères Larrieu.
© Pyramide Distribution

Certains de vos personnages portent une certaine colère ou des traumatismes qui le mettent en tension. Mais ils restent cependant très sensibles, ce qui entraîne chez eux des réactions tout aussi extrêmes.

Dans Le Roman de Jim, justement, Aymeric a du mal à avouer ses sentiments derrière son apparence de roc qui encaisse les aléas de la vie. J'aimais bien l'idée qu'il ne soit pas soumis à de grands changements psychologiques. Ses actions et sa manière d'être sont cohérentes de A à Z. C'est un vrai gentil, ce qui n'est pas péjoratif, alors que souvent on fait de la gentillesse un défaut. Ici, on montre un personnage dont la gentillesse est une caractéristique commune à l'humanité.

Vu qu'il s'agit d'une des premières fois où vous jouez ce type de personnage, comment expliquez-vous le fait que vous ayez souvent joué l'inverse ? Est-ce que cela dépendait des réalisateurs ?

J'ai joué des rôles très différents et certains affichaient déjà de la bonté, même si cela apparaissait chez des personnages plus ambivalents, parfois violents ou de purs escrocs. Ce que j'aime, c'est la complexité et la nuance dans les rôles, loin de tout manichéisme. J'ai eu la chance d'en jouer déjà beaucoup. Dans Le Roman de Jim, Aymeric n'est pas si gentil que ça, à l'image de la vie où les choses peuvent parfois basculer ou pas.

Vincent doit mourir ou Le monde est à toi ont utilisé vos capacités physiques et votre corps de manière burlesque. Est-ce une direction que vous souhaitez continuer d'explorer ?

J'ai adoré travaillé de cette façon avec Stéphan Castang et Romain Gavras. Les scénarios de ces deux films ont été très amusants à porter à l'écran. Et comme j'aime m'amuser dans ce métier dans différents types d'univers, j'ai été ici comblé.

Vous êtes aussi apparus dans des films avec un large casting, des films de "groupe" ou "d'ensemble", dans lesquels vous aviez un second rôle important, comme Voir du pays ou La troisième guerre, ou plus particulièrement dans Un monde où l'effacement était à la base du travail sur les apparitions du personnage. Comment est-ce que vous avez travaillé cet effacement et cette mise au diapason des enfants ?

Ça s'est très bien passé. Laura Wandel m'a effectivement permis de travailler mon jeu de jambes (rires). Dès le départ, elle m'avait expliqué que sa mise en scène épouserait le regard des enfants. L'idée était de voir comment les adultes interagissent avec cet univers hermétique de l'enfance. J'étais heureux de pouvoir m'insérer dans cette utilisation du langage cinématographique. Cela permet de donner une autre image de la cour d'école qu'on conçoit toujours sous le mode innocent de la récréation alors que je la voyais comme une prison avec ses barreaux et comme un lieu véritablement fermé.

Un de vos autres rôles marquants est celui de Goutte d'or. Comment s'est passé le travail avec Clément Cogitore ? Et quel regard portez-vous sur le mystère du film et la manière dont le personnage l'affronte ?

Là aussi, j'ai adoré travailler avec lui, c'est un grand cinéaste et un grand homme. Goutte d'or est un thriller social ancré dans les quartiers du nord de Paris qu'il va tirer vers fantastique. L'onirisme dans le film est aussi important que sa part cauchemardesque.

Le Roman de Jim ne se révèle pas non plus à la première vision et garde une part de mystère qui laisse le film ouvert à l'interprétation et aux relectures.

Je trouve que le film est très simple et universel. L'opacité du personnage, la blessure qu'il ne dévoile pas, ce qui se trame en lui, étaient des choses qui m'intéressaient. Après avoir vu plusieurs autres films des frères Larrieu, je trouve que Le Roman de Jim est peut-être celui qui est le plus accessible, dans le bon sens du terme, le plus ouvert et celui que je pourrais montrer au plus grand nombre.

Vous avez déjà travaillé plusieurs fois avec certains acteurs et actrices de la même génération que vous, comme Adèle Exarchopoulos ou Leïla Bekhti. Avez-vous un sentiment d'appartenance ? Est-ce qu'il y a des signes de reconnaissance ou une manière spécifique d'aborder les rôles ?

Non. J'ai pris du plaisir à travailler avec Adèle et Leïla, mais je suis curieux de nature et intéressé de travailler avec toutes les générations, comme par exemple Bouli Lanners que j'ai croisé plusieurs fois. Parler en termes de génération ou autres ne signifie rien pour moi. Autre exemple, dans Vincent doit mourir, j'ai travaillé avec un "maître Yoda du théâtre", François Chattot, et j'ai adoré ça. Pour Le Roman de Jim, c'était ma première fois avec Sara Giraudeau et Lætitia Dosch. J'aime découvrir de nouveaux univers, que ce soit ceux de cinéastes ou d'acteurs. Je n'effectue pas mes choix en fonction d'un dogmatisme ou d'une ligne de conduite. Je me laisse porter par les rencontres et j'aime alterner des choses très différentes.

À côté des films d'auteurs que nous venons d'évoquer, vous avez aussi joué dans beaucoup de premiers films mais aussi des films parfois à l'opposé de ce cinéma-là, comme BAC Nord de Cédric Jimenez, qui est plus un film d'action. Qu'est-ce qui vous motive en premier lieu ?

C'est d'abord l'objet scénaristique, qui me permet concrètement de voir si j'accroche ou pas et si je peux me projeter. Après, je suis aussi guidé à la fois par mes envies du moment et ce que le projet peut apporter dans sa singularité puisque j'aime avant tout faire des choses très différentes. Une fois que j'ai rencontré les cinéastes, je cherche à voir comment je peux m'insérer dans leur grammaire. Je ne travaille donc jamais de la même façon mais toujours en m'adaptant à l'univers et la langue des cinéastes. J'aime aussi beaucoup travailler en amont le texte et dialoguer autour du scénario, en me mettant à table avec l'équipe afin d'avoir une vision commune dans laquelle se diriger avant de commencer à tourner. Mais aussi je peux m'adapter. Les frères Larrieu sont très précis sur les mots et j'ai suivi à la lettre ce désir. Mais cela ne veut pas pour autant dire que j'étais privé de liberté.

Quelle cinéphilie vous a nourri ?

C'est assez large. De L'armée des ombres de Jean-Pierre Melville au cinéma américain des années 90 qui représente mon enfance, en passant par le cinéma social anglais, les grands films français ou le cinéma belge. J'ai eu la chance de voir des films très différents, ce qui se traduit là aussi dans mon désir de voyager dans des univers variés. Ma cinéphilie m'a rendu très curieux des autres. À tout moment, on peut découvrir des films importants sur le tard comme récemment Un après-midi de chien de Sidney Lumet. Quand je commence un film, j'essaie de ne pas m'oublier en tant que spectateur.
 

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