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Tahar Rahim dans la prison dans Désigné coupable
Le Majeur en crise

« Désigné coupable » de Kevin McDonald : La Constitution des États-Unis, l’autre conquête de l’Ouest ?

David Fonseca
Le thème de la frontière, notamment dans le cinéma nord-américain, n’a jamais cessé de produire une certaine image de l’Amérique, confiante ou défaite, comme la mise en récit de la construction d’un peuple singulier. À cette histoire de la frontière, dont la conquête de l’Ouest est le pendant quasi naturel, qui a été tantôt physique, terrestre, mais aussi spatiale, mentale, autant que culturelle, économique, sociale... nombre de productions hollywoodiennes, comme le dernier film de Kevin McDonald, Désigné coupable, en attestent et y ajoutent la conquête du droit, soit la mise en norme comme la mise en règle d’une société donnée à travers ses commandements juridiques. Ou comment la Constitution des États-Unis apparaît comme l’autre conquête de son Ouest, mais pour produire un film sur le droit, dans le cas de Désigné coupable, prétendument critique à l’égard de la législation du Patriot Act, mais qui se parjure finalement lui-même, la reconduisant dans ses motifs comme ses principes.
David Fonseca

« Désigné coupable », un film de Kevin McDonald (2021)

Certains critiques louent souvent la capacité du cinéma nord-américain, dans sa version hollywoodienne, a faire sienne cinématographiquement l’histoire des États-Unis la plus récente, pour l’opposer à une certaine incapacité du cinéma français à simplement l’approcher. Pour le dire sommairement, d’opposer un cinéma quasi contemporain des événements relatés – la guerre du Vietnam en étant l’exemple paradigmatique comme aujourd’hui les attentats du 11 septembre 2001 – à un cinéma tardif dans le cas français, la guerre d’Algérie servant de contre-exemple. Saisie immédiate de l’histoire, sans doute, devoir de mémoire, peut-être, mais encore faudrait-il se demander quel type d’histoire est alors raconté ? L’un des récents exemples en date de cette force hollywoodienne à se ressaisir de l’actualité la plus pressante est sans doute Désigné coupable, la dernière réalisation de Kevin McDonald, un film labellisable « cinéma post-11 septembre », une force qui, commémoration oblige, vingt après les attentats, est autant une farce dans le film, offrant une virée horrifico-carnavalesque dans l’après maison des 3000 morts, un voyage que récuserait sans doute Rob Zombie.

Sous cet aspect, Désigné coupable possède néanmoins sa petite musique, sinon une originalité, du moins a-t-il un point de vue sur ces événements. Il tend à s’inscrire, semble-t-il, dans un genre, le cinéma sur le droit, genre trop peu souvent identifié au cinéma. S’il existe un cinéma de cour/de procès, où le tribunal américain fait office de représentation symbolique de la concorde sociale, le lieu de résolution de ses tensions comme de ses conflits, l’instance médiatrice et pacificatrice par où se reconduirait en permanence le serment de Philadelphie, scellant l’union de toutes les forces antagonistes américaines, le cinéma sur le droit ne se concentre pas tant sur les figures obligées du cinéma de cour, qu’il s’agisse de montrer un avocat au travail, comme un juge ou un procureur. Plutôt, le cinéma sur le droit s’intéresse frontalement ou comme sous-texte au médium du cinéma de procès, c’est-à-dire au droit. Dans le cas nord-américain, plus particulièrement à sa Constitution, toujours présentée comme infrangible et permanente, sous-entendant que celle-ci serait la même depuis la date de son adoption en 1787. Une stabilité qui ferait sa force comme sa supériorité sur les autres constitutions du globe, une manière comme une autre de l’opposer, par exemple, à celle d’un autre peuple qui lui disputerait la première place en héraut des droits de l’Homme, celle du peuple français, peuple tumultueux pour une France caractérisée au contraire par l’instabilité chronique de ses régimes politiques, celle-ci ayant connu durant la même période une vingtaine de constitutions différentes (écrites, non écrites, révisées, non appliquées) comme autant de régimes politiques antipodes (instabilité cependant contrebalancée par une continuité sur le plan administratif). Une présentation qui serait toutefois singulière de l’histoire constitutionnelle américaine, retranchant de cette stabilité nombre de révisions dont la Constitution des États-Unis aurait fait l’objet depuis 1787 via ses nombreux amendements.

De ce point de vue, Désigné coupable est l’un des derniers avatars en la croyance que la Constitution des États-Unis aurait été, aussi, le lieu d’une conquête, cela quand bien même son Ouest aurait été repoussé au-delà de ses frontières après les attentats du 11 septembre 2001, à travers la législation du Patriot Act, en situant son droit hors-frontière, amputant du droit l’humanité de ceux qu’il s’agissait de poursuivre comme d’incriminer pour fait de terrorisme, tel Mohamedou (Tahar Rahim) qui, dans Désigné coupable, pour avoir été en lien avec Ben Laden, se retrouvera dans la vraie vie comme au cinéma dans le funeste camp de Guantánamo, incarcéré des années durant sans même avoir été inculpé ni jugé, mais torturé. Un film sur la manière dont le droit constitutionnel, à travers la législation du Patriot Act, aurait été repoussé dans ses retranchements ou comment l’État de droit aurait fait une virée sous ecstasy, un bad trip movie façon Las Vegas Parano.

Sentiment sans doute tout à fait honorable de faire un film sur les valeurs d’un État de droit digne de ce nom quand le droit aurait été l’oublié de cette histoire, son soldat inconnu, pour lui rendre mémoire. Toutefois, le premier problème du film demeure tout au long son didactisme. Désigné coupable montre en permanence ce qu’il expose, de sorte que tout y soit prédestiné. Cinématographiquement, l’avocate de Mohamedou (Jodie Foster), le rencontrant pour la première fois, lui propose ainsi textuellement d’écrire le récit de son drame, ce qui par ricochet servira de scénario au film comme de prétexte, autant qu’il produira un effet de légitimation, ce que les images, par flash-back, illustreront en retour, depuis l’incarcération de Mohamedou jusqu’au jour béni de son procès. En somme, un film de plus à la remorque de son scénario, avalant toute idée de cinéma, aussi propret que la cravate bien nouée, tellement kolé séré du juriste, au sérieux de qui Apollinaire demandait  « La cravate douloureuse que tu portes et qui t’orne ô civilisé ôte-la si tu veux bien respirer... », à qui le spectateur de Désigné coupable voudrait demander de ne pas le finir étouffé.

Shailene Woodley et Jodie Foster pendant le procès dans Désigné coupable
© Tobis Film GmbH

Les personnages centraux de Désigné coupable, du côté des représentants de la loi, sont ainsi faits de marbre marmoréen, offrant des images d’Épinal sur le droit plutôt que des plans de cinéma. Ainsi, Jodie Foster, l’avocate de Mohamedou, incarnera la froide justice dans le film, sans égard pour les sentiments ni pour l’homme qu’elle défend, le droit dans sa plus impassible représentation, droit général, impersonnel, permanent, marteau de justice sur pattes, l’État de droit incarné sur les traits figés de son visage statufié, incarnation vivante à l’écran de Thémis-la-déesse-de-la-justice-aveugle. Conséquente avec la construction de son personnage marquée au burin, lors de sa rencontre avec l’avocat de la partie adverse poursuivant Mohamedou, à la question de savoir si cela ne la gêne pas de défendre un tel homme, dégaine-t-elle son marteau en guise d’arme : « Je défends l’État de droit », et de l’assommer définitivement avec une sentence digne d’un épisode de feu la série Tribunal sur TF1 : « N’avez-vous pas l’impression d’avoir abandonné vos principes en construisant ces prisons ? »

La problématique de Désigné coupable, qui est au fond un problème de droit, formulée comme dans un bon vieux sujet d’examen, mais qui n’est malheureusement pas montée comme un problème de cinéma, devient dès lors le suivant : si la cour Suprême des États-Unis a reconnu un droit d’Habeas Corpus dans cette affaire, au sens de l’obligation pour le gouvernement de produire les preuves de l’inculpation de Mohamedou, ce qu’un tribunal tranchera le cas échéant, comment l’y contraindre quand ce gouvernement s’y refuse obstinément ? C’est que Justice Aveugle n’entend pas du tout fermer les yeux en matière de terrorisme. D’une part, les courriers de Mohamedou écrits à son avocate afin de lui livrer son récit et, le cas échéant, de l’innocenter, sont lus par une équipe de filtrage, organisme curieux, à la fois indépendant du gouvernement, qui n’en censure pas moins les lettres, considérant ce qui doit être classifié ou non. Autrement intéressant aurait été peut-être de savoir à qui cet organisme rend des comptes ou non, si par exemple Désigné coupable avait été tourné en plein délire par Sidney Kafka comme son double, Franz Lumet. D’autre part, quant aux originaux dans cette affaire ayant conduit à l’arrestation de Mohamedou, ils ont tous été effacés par surimpression d’encre : rien à voir, rien à lire, le droit expurgé de sa graphie, parchemin invisible, aussi inaccessible que la loi censée protéger Mohamedou, inatteignable loi dans Le Procès du vrai Kafka, que filmait Orson Welles (1962), poursuivant impossiblement de sa caméra Anthony Perkins comme la loi et les motifs de son inculpation lui échappaient. Mais que chacun soit pourtant rassuré, exit Kafka, tout finira au mieux pour Mohamedou : droite justice, dans sa pesée, saura distribuer les bons pains en fin de film, quittant les terres arides des codes pour celle des cieux, s’élevant vers le Très-Haut. Amen !

Le deuxième problème de Désigné coupable ne réside pas tant, dès lors, dans son happy end de circonstance, le spectateur ne devant rien attendre d’autre de ce type de cinéma, quitte à s’en contenter voire s’en réjouir, que dans le fait que ce cinéma croit indéfectiblement en sa conquête. Son horizon, déterminé par son Ouest juridique, aurait été définitivement atteint selon lui, cette conquête présentant un caractère assignable à un lieu près, tout autant qu’elle serait définitivement achevée dans la Constitution des États-Unis qui, de fait comme de droit, offrirait conséquemment une solide protection contre toute forme d’arbitraire et de mesures liberticides, soit le nec plus ultra de l’État de droit. Par chance, Mohamedou ne serait pas tombé dans Le trou de Jacques Becker, soit n’importe où ! Une Constitution, donc, non pas pensée comme une Constitution vivante dans Désigné coupable, pour le pire et le meilleur, mais une Constitution forclose, scellée dans son destin comme se refermerait un dossier après une plaidoirie bien ficelée. Une Constitution qui ferait, ainsi, la beauté comme la supériorité des États-Unis sur le terrain de la lutte pour les droits de l’homme dans le film. Une Constitution qui serait, non pas la 51e étoile du drapeau américain, sa dernière conquête, mais sa voie lactée, la Constitution les contenant toutes, c’est-à-dire la somme de toutes les étoiles du drapeau comme chaque pavillon battant sur le reste du globe. L’Amérique n’aurait pas dès lors seulement conquis le monde à travers sa puissance économique, culturelle, linguistique... Le Droit serait autant sa conquête comme il définirait le lieu de son territoire. La preuve de cette irrésistible puissance de sa conquête, dans Désigné coupable, est qu’elle gagne, par effet de contagion, y compris l’autre partie au procès, du côté du ministère public, qui n’a pourtant pas les mêmes intérêts à défendre dans cette affaire. Évidemment, il faut d’abord avant tout « faire un exemple » du cas Mohamedou, la riposte s’engageant, le gouvernement fourbissant ses armes avec son avocat maison, un militaire qui veut en découdre, parce qu’il aurait connu son drôle de drame le 11 septembre 2001.

Toutefois, très tôt, le juriste qui sommeillait en lui se lève d’entre les morts, car malgré son tempérament de va-t-en-guerre, cet avocat Phénix s’inquiète de ne disposer que des résumés des audiences, non pas des mémorandums, c’est-à-dire des originaux, pour prouver l’inculpation de Mohamedou. Or, le seul qui soit autorisé à la lecture des originaux est un général qui se trouve à Guantánamo, l’autre pays du cauchemar, à la rencontre duquel il partira, rencontre qui lui fera changer sa pesée d’épaule (personnage du général qui est absolument déterminant dans la vraie vie du vrai camp de Guantánamo, dont le rôle dans le film, au regard du thème qui le parcourt, est maladroitement minoré, il faudra y revenir plus loin).

En effet, l’accès aux memorandums lui apportera la preuve que Mohamedou a été torturé, dans le cadre d’une torture qui ne serait pas simplement le fait de quelques nostalgiques de la Kapoland, mais une torture systémique, signée et autorisée par Donald Rumsfled himself. Ce que, le point est capital, en tant que « chrétien », son être ne peut que réprouver car, dit-il, « nous avons prêté serment de défendre la Constitution », cette dernière ne le permettant pas, comme si, par nature (référence induite par la chrétienté de l’avocat, en lien avec le texte constitutionnel), cette Constitution des États-Unis avait toujours été le garde-fou des droits et libertés des minorités. Au vrai, ce n’est pas par nature que la Constitution des États-Unis, comme n’importe quel autre texte juridique, serait protectrice en matière de droits de l’Homme. Car tantôt l’a-t-elle été, tantôt de garde-fou s’est-elle plutôt commuée en garde-chiourme des intérêts du gouvernement à discriminer négativement certains individus. Ainsi, est-ce le cas du fameux 13ème amendement à la Constitution, emblématique de cette ambiguïté, texte juridique applicable et appliqué dans l’affaire Mohamedou pour le défendre.

Précisément, ce 13e amendement à la Constitution a mis un terme à l’esclavagisme (adopté le 6 décembre 1865), considérant que tous les individus se trouvant sur le sol américain devaient se voir reconnaître une égale protection  due par la loi. Toutefois, sur le fondement de ce même principe d’égalité, la Cour Suprême des États-Unis va réintroduire aussitôt ce qui avait été évacué par la fin de l’esclavagisme, soit un traitement juridique différencié des noirs, considérant que la ségrégation raciale ne contrevenait pas à ce principe d’égalité, dans l’affaire Plessy versus Ferguson (1896), en consacrant la fameuse doctrine « separate but equal », c’est-à-dire blancs égaux entre eux, noirs égaux entre eux, pourvu que chacun demeure dans son espace étroitement défini et délimité, espace libre pour les blancs, avec autant de droits à loisir, espace asservi autrement pour les noirs, versés dans la catégorie des sous-droits, les réduisant à la hauteur de la manière dont ils étaient considérés hiérarchiquement, soit des sous-hommes, en somme réifiés par la loi, pas plus que des choses malgré la poésie d’Eugène Guillevic. Comprenons : le principe d’égalité autorise alors juridiquement l’inégalité de traitement, soit encore plus simplement l’équivalence égalité=inégalité. C’est toujours sur ce même fondement juridique, en 1954, que la Cour Suprême mettra un terme à cette doctrine, dans l’arrêt Brown versus Board of education. 13e amendement toujours, même principe d’égalité à l’appui de son raisonnement, qui lui permettra encore de constitutionnaliser cette fois-ci la discrimination positive, d’abord timidement en 1978, puis franchement au début des années 2000, pour rétropédaler ensuite (2007).

Un même amendement, donc, le 13e du nom, a pu tout aussi bien justifier légalement la discrimination raciale autant que la discrimination positive, tantôt en défaveur, tantôt en faveur des noirs américains. Ce n’est donc pas par nature que ce 13e amendement, tout comme la Constitution des États-Unis, serait protecteur de qui que ce soit, mais au gré des versions délivrées par un juge, fût-il de la Cour Suprême. Ce qui est dès lors systémique, dans ce genre cinématographique sur le droit, est qu’il est toujours un peu court de vue pour un cinéma de cour qui voudrait faire son cours de droit. Systémique, donc, en s’efforçant de faire croire que la Constitution protégerait par nature Mohamedou quand le politique/la politique, à travers le Patriot Act, déraisonnerait, comme si cette conquête était la fin de l’histoire, à la manière dont le croyait à la chute du mur de Berlin le philosophe Francis Fukuyama pour les démocraties libérales.

Théorie des dominos oblige dans Désigné coupable, dès lors, y compris Mohamedou-le-mauritanien-de-l’histoire est conquis par ce récit juridique, arraisonné par cette logique de contamination, devient plus américain qu’un native tongue, via un processus de nationalisation qui, paradoxalement, aura  lieu lors des séances de torture, ce qui, définitivement, dégoupillera toute velléité critique à l’égard du gouvernement américain comme du Patriot Act. Le film devient alors antipode, pour ne pas dire qu’il tourne fou. Désigné coupable ne critiquerait pas tant, finalement, la politique américaine en matière de lutte contre le terrorisme qu’il l’adouberait par ses choix de réalisation, critique qui semblait pourtant bien figurer initialement sur le papier du scénario déroulé par le duo Foster/Mohamedou.

En effet, Mohamedou, lors de sa plaidoirie finale, sur laquelle se terminera Désigné coupable, se montre définitivement plus américain que le premier redneck venu, plus chrétien que le dernier des reborn again : il ne tend pas simplement l’autre joue quand la première a été giflée, il redonne à son cœur les couleurs du drapeau US qu’il n’avait plus.

Pour ce faire, curieusement mais non pas paradoxalement, cette plaidoirie ne se situe absolument plus sur le terrain du droit. Chose curieuse, a priori, pour un film qui entendait pourtant en tresser les louanges. Bien au contraire, sa défense est ajuridique dans son principe, Mohamedou articulant la logique de son auto-plaidoirie sur un plan prophético-religieux, en une tirade cyranesque mi biblico-mi coranique (cyranesque par sa longueur, non par son talent) : « J’ai envie de pardonner parce que Allah, mon Dieu, le veut. C’est pour cette raison que je ne tiens pas rigueur à ceux qui m’ont torturé ou fait du mal », précisant que, en arabe, le mot pour signifier « libre » et « pardon » est le même. « C’est pour ça que même ici je peux être libre….Puisse dieu nous pardonner, que Dieu soit avec nous », Désigné coupable se terminant dans une concorde que le serment de Philadelphie jalouserait, son geôlier, comme son juge et les avocats, d’approuver l’oratio, mais sans plus dire un seul mot, ce qui est notable pour des avocats, dont il est souvent dit à propos d’eux qu’ils sont des « diseurs », lui laissant le dernier mot/la dernière parole, comme si Dieu avait parlé dans sa bouche.

Victoire du droit, donc ? L’Ouest constitutionnel définitivement conquis ? Sa frontière atteinte ? Ce twist final, car il s’agit bien d’un twist, retourne plutôt en son envers le droit pour l’aplatir définitivement sous les bons augures tantôt du bon avocat chrétien, celui du ministère public, tantôt sous les louanges adressées à Dieu par Mohamedou, louanges partagées comme reçues par l’ensemble de l’auditoire. Non pas victoire du droit, dès lors, ou plus précisément, du droit indexé sur des valeurs religieuses, récusant par conséquent toute forme de justice immanente (celle des hommes, qu’on appelle le positivisme juridique, mise sur pied dans un État de droit), pour être plutôt ancrée dans un codex transcendantal (celui des commandements de Dieu). Serait-ce parce que Mohamedou serait sociologiquement incapable de se sortir de sa condition de Mauritanien nourrie aux versets coraniques ?

Bien au contraire, Mohamedou est l’incarnation vivante comme la figure actualisée du pionnier US dans Désigné coupable, ce pionnier banni de ses terres (hier européen, aujourd'hui américain) qui se serait refait l’humanité sur un territoire « vierge », celui de l’Amérique. Finalement, si Mohamedou est sauvé dans le film, ce n’est pas grâce au processus de juridicisation des droits de l’homme, c’est parce qu’il n’est pas comme « eux » (les Mauritaniens) mais comme « nous »,  les Américains, rendant le processus d’identification possible, donc larmoyant, pour un type qui fait office de native man, membre de l’équipage de la Mayflower Company, comme tous les autres bénis du pays. Mohamedou, dans Désigné coupable, n’est plus mauritanien, car qui s’en serait soucié (à Hollywood) ? Le processus de torture achevé, il est désormais américain. Ce qui touche dans son discours est sa fibre mi-patriotico-religieuse/mi-séries TV US, qu’il cite. Mohamedou, au fond, est un pionnier, à l’instar des premiers du nom, une manière pour le film de refaire le mythe comme de réintroduire de l’ordre dans ce qui avait été perturbé (soit l’idéal du melting pot). Mohamedou reconduit le rêve de l’Amérique, encore fallait-il au préalable le laver de ses scories, de tout ce qui l’encombrait encore, les séances de torture s’apparentant, dès lors, à sa mise au purgatoire, la question n’étant plus celle de savoir si ses droits ont été bafoués mais s’il deviendra, finalement, un véritable américain.

Mohamedou semble bien incarner la figure du pionnier des premiers temps, car le voici dans le film au croisement de toutes les frontières, notamment géographique et juridique. Tout d’abord est-il déplacé/extradé vers un territoire étranger, hostile, symbolisant l’autre frontière des États-Unis, la seule qui lui resterait à investir, Guantánamo ne se trouvant pas, en effet, sur le sol américain, mais dans le Sud-Est de l’île de Cuba. La conquête de l’Ouest déplacée sous d’autres latitudes, l’Ouest à l’ouest, perdu, l’ouest désormais au Sud-Est, chacun y perdrait le nord, mais non pas Mohamedou, car ce dernier fait encore autrement l’expérience du pionnier, pour se retrouver, de surcroît, aux abords d’une autre frontière/à la frontière du droit nord-américain, subissant l’épreuve de son feu, celle du Patriot Act. Un déplacement à la frontière/bord frontière/hors frontière qui devient cependant l’occasion favorable pour Mohamedou de devenir, enfin, un véritable citoyen américain. De sorte que ce ne sont pas les droits d’un individu (étranger) qui soient défendus dans Désigné coupable, mais, à l’image, ce qui est montré, désigne plutôt le processus de civilisation dont va être l’objet Mohamedou. Définitivement, Mohamedou n’aura jamais été un « étranger » dans le film, montré dans et pour sa différence, auquel cas son destin aurait été vite scellé. Au contraire est-il montré dans sa mêmeté, à travers ce qui fait son identité avec le peuple américain. De sorte que sa torture (lui) apparaisse finalement plus douce, lui qui n’a finalement jamais véritablement cessé d’être, au fond, un véritable autochtone, même lorsque son existence était gauchie en Mauritanie, car il y regardait déjà Ally McBeal et New-York, police judiciaire, confessera-t-il lors de sa plaidoirie finale, séries qui lui auraient appris combien les États-Unis ne pouvaient pas ne pas être aussi malveillants à l’égard des détenus.

Benedict Cumberbatch mène l'enquête dans Désigné coupable
© Metropolitan FilmExport

Ce thème de la frontière (frontière géographique/frontière juridique), abordé dans Désigné coupable, est essentiel pour comprendre l’histoire des États-Unis autant que le parcours de Mohamedou. C’est ce qu’avaient compris très tôt parmi les premiers présidents nord-américains Thomas Jefferson et Andrew Jackson, à travers l’importance pour l’État naissant de sa poussée vers l’Ouest. Un historien, Frederick Jackson Turner, en montrera la logique comme les effets dans son célèbre ouvrage The Frontier in American History. Pour l’essentiel, l’historien montre combien cette expansion est concomitante du développement de la démocratie américaine comme de la civilisation nord américaine, raisonnant par analogie à partir du parcours de Thomas Jefferson et celui des premiers pionniers : « Jefferson was the first prophet of American democracy […] Jefferson himself was born in the frontier region of Virginia […] His father was a pioneer »(1). Cette frontière devient ainsi le chemin de tous les possibles comme elle est auréolée d’une majesté particulière : elle permettrait l’apparition d’un homme nouveau. En somme, les conditions de vie rugueuses à l’Ouest favoriseraient la promotion du common man (l’homme du peuple), comme un esprit de solidarité. Tout comme le roi Midas changeait le plomb en or, au contact de la frontière les Européens seraient devenus de véritables Américains : « The frontier is the line of most rapid and effective americanization(2) ».

Une vie dangereuse où le pionnier se forge définitivement son optimisme, tel Mohamedou dans sa cage, où l’ex-colon doit le plus souvent agir seul face à des situations périlleuses, sans autre béquille que lui-même, frontière où ce dernier doit décider seul et rapidement, en ne comptant que sur l’aide de Dieu, comme Mohamedou ne renoncera jamais au Très-Haut. Autant de thèmes qui seraient au fondement de la pensée américaine, méfiante – paraît-il – à l’égard de toute forme d’organisation centralisée, qui s’en remettrait plutôt à une décentralisation de l’autorité, cette pensée, tout comme elle se termine dans le film, étant empreinte d’une forte religiosité.

Ce n’est donc pas une curiosité si Désigné coupable se termine sur un sermon de type religieux. Mohamedou, tout comme Thomas Jefferson pour l’historien, est un  nouveau « prophète », un « prophète » de plus qui, au péril de sa vie, se voit révéler sa véritable identité, coup de clairon, son américanité.

Mais, cependant, Désigné coupable formule alors une chose et son contraire. Quand il dit « État de droit », il prononce « religion ». Il commet ce faisant une faute logique, une antilogie, une contradiction performative, un discours qui est à soi sa propre contestation, qui dément sa vérité. Au moment où il entend défendre comme asseoir l’État de droit relatant le parcours de Mohamedou, il en ruine jusqu’au principe, de sorte que ce qu’il dit est contredit à l’instant où il le formule. Désigné coupable, à l’instar du Patriot Act, est un monstre cinématographique, un film sur le droit de type anomal. Une réalisation utilisant le droit pour en maudire les principes, écraser les assises, se terminant non pas sur la victoire de l’avocate Jodie Foster, c’est-à-dire la victoire de l’État de droit sur l’infâme Patriot Act, mais sur les commandements divins. Le propos de Désigné coupable devient aussitôt retors que la législation du Patriot Act, qu’il ne combat absolument pas ou plus, qu’il reconduit davantage dans son maléfice. Précisément, si le film se termine sur une plaidoirie à caractère religieux et non pas juridique, c’est qu’à Guantánamo, de droit, il n’en a jamais été, en vérité, question, le film faisant croire faussement que la question se posant étant celle de la violation de l’État de droit quand la législation du Patriot Act se veut, par ses engrosseurs/législateurs, paradoxalement, vertueuse sur ce plan, la véritable question étant de savoir pourquoi les accusés ont été détenus sur le sol cubain et non pas sur le sol américain, tout comme Mohamedou ? Il faut alors faire un peu d’histoire, à cet égard, à propos du Patriot Act comme de Guantánamo.

La législation du Patriot Act a souvent été présentée par ses détracteurs comme niant les principes constitutionnels nord-américains, précisément ceux de l’État de droit en se situant dans le registre de l’exceptionnalité. Il est vrai que cette législation présente un caractère inédit : le Patriot Act entend, par le droit, vider de tous les droits possibles celui qu’elle identifie non plus simplement comme un « prisonnier » ou un détenu, mais qu’elle qualifie de « combattant illégal » ou « combattant ennemi ». Un droit qui installerait au cœur de l’État de droit un non-droit. D’emblée, par cette qualification sans précédent, cette législation entend pourtant ne pas être condamnable au nom des engagement internationaux pris par les États-Unis par le passé, notamment dans le cadre des conventions de Genève (notamment celle de 1949), dont l’une d’elles prévoit que tout individu soustrait du terrain des opérations militaire pour être fait prisonnier ne doit jamais se voir infliger des actes de torture ou des traitements inhumains et dégradants. En n’étant plus simplement un « prisonnier » mais un « combattant illégal » ou « ennemi », selon les géniteurs du Patriot Act, le supposé terroriste se serait de lui-même exclut du champ de la protection des conventions internationales, qu’il aurait violé. Le Patriot Act, selon l’administration Bush, ne transgresserait donc pas les conventions internationales ratifiées par les États-Unis. Cette législation ne ferait que prendre acte de la zone de non droit dans laquelle se serait placé délibérément le terroriste. Son champ d’application ne lui serait tout simplement pas possible, inutile, donc, de s’en revendiquer. Conclusion, sur le plan international, aucun droit ne serait violé, l’honneur des États-Unis sauf, l’État de droit préservé.

Mieux encore, de ce statut tout à fait révolutionnaire de « combattant illégal », le Patriot Act en fait découler juridiquement une liste de non-droits. Ainsi, tel Mohamedou, contre tous les principes juridiques nord-américains, le « combattant ennemi » qu’il est, ou supposé tel, ne se verra pas lire ses droits, sous entendu ne connaîtra pas les raisons pour lesquelles il est détenu (les révolutionnaires français ont pris la Bastille contre la lettre de cachet, articulée sur la même logique), lecture des droits à laquelle le cinéma comme la télévision avaient pourtant habitué le spectateur Mohamedou mais New-York, Police judiciaire n’y pourra plus rien. De la même façon, le « combattant illégal » ne connaîtra ni la durée de sa détention ni la date de son procès, ce qui a pour conséquence immédiate de commuer sa détention en peine possiblement à perpétuité, sans qu’aucune sentence n’ait été pourtant prononcé par un tribunal. Enfin, lui est encore empêchée la faculté de recourir à une défense par l’entremise d’un avocat, comme n’importe quel autre inculpé… mais, là-aussi, nulle contradiction avec l’État de droit, répliqueraient les juristes de l’administration Bush, puisque précisément le « combattant illégal » n’a pas été inculpé, aucun motif de poursuite ne lui ayant été notifié, pas plus que la lecture de ses droits. Autant dire que le Patriot Act aurait enfanté un monstre juridique, exposant le terroriste à ce que le philosophe Giorgio Agamben a nommé « la vie nue », soit une vie dépossédée de la personnalité juridique comme des droits et libertés afférents. Mais, conséquence immédiate sur le plan de l’État de droit, ce que ne montre jamais Désigné coupable, si le combattant « illégal » est vidé de toute forme de droits, il n’est plus possible, ni pour lui de recourir à la loi pour se défendre, ni prétendre dans le même temps que ses droits auraient été violés...puisqu’il n’en aurait pas ou plus. A moins de considérer que, en se situant sur le plan religieux, en fin de film, le réalisateur en tire les conclusions s’imposant, ce sur quoi il faudra s’attarder.

Ce talent perfide avec lequel l’administration Bush entend montrer que le Patriot Act ne contreviendrait pas à l’État de droit est couronné encore sur le plan interne, en ayant l’idée  conséquente de placer ces individus, non pas sur le sol américain, là où possiblement ils auraient pu se prévaloir de la Constitution, mais à Guantánamo, là où ce droit ne pourrait pas trouver à s’appliquer, selon elle. Un petit retour en arrière est encore nécessaire pour comprendre pour quelle raison une base militaire nord-américaine, sur un territoire étranger, échappe à ce que les juristes nomment un statut d’extra-territorialité, soit l’application d’un droit national sur un sol pourtant étranger, à l’instar des ambassades, situation qui aurait dû prévaloir à Guantánamo, qui ne l’a pourtant jamais été. Pourquoi ?

Fin 19e siècle, les États-Unis renoncent à coloniser Cuba. Toutefois, l’île possédant un intérêt stratégique pour les Américains, il est décidé, contre monnaie sonnante et trébuchante versée chaque année par le Gouvernement américain à Cuba, que l’U.S.Army en occupera une partie du territoire, soit le Sud-Est de l’île. Mais, Fidel Castro arrivé au pouvoir dénonce cet accord, considérant qu’il s’agit là d’une colonisation larvée du pays. Demande est faite aux Américains de la quitter aussitôt, à quoi ils opposent un refus en y demeurant. Fidel Castro, en signe de protestation, refusera désormais de percevoir cette rente annuelle, quand les États-Unis continueront de la verser dans une banque de dépôt, en attendant que leur présence redevienne désirée. Conséquence sur le plan juridique, Fidel Castro ne reconnaît plus alors cette partie du territoire comme étant cubaine, de sorte que le droit Cubain n’y sera pas applicable pour la défense comme la poursuite de qui que ce soit. Respectivement, côté américain, cette partie du territoire étant contestée sur le plan de la souveraineté, le droit constitutionnel Nord-américain ne s’y appliquera pas davantage. Résumons : à Guantánamo, ni le droit Cubain, ni le droit Américain s’appliquent. Seul un droit d’exception y fait office de système juridique de transition, précisément, Jodie Foster ne rencontrant pas dans Désigné coupable un membre du gouvernement ni un juriste, mais un général qui, dans la vraie vie, est aussi et dans le même temps président du tribunal d’exception mis sur pied à Guantánamo par le biais du Patriot Act afin de juger les « combattants illégaux ». Conclusion, selon l’administration Bush, contre les critiques internationales, notamment celles formulées par la France, l’État de droit n’a jamais été violé par le Patriot Act puisque de droits, à Guantánamo, il n’y en aurait pas, du moins au sens non exceptionnel du terme. Guantánamo, comme tout le Sud-Est de l’île, devenant ainsi, autant dans Désigné coupable, le dernier Far West, une terre vierge et nulle de toute souveraineté, comme le dit le droit international, de sorte que tout y soit possible, c’est-à-dire une terre à conquérir pour y devenir enfin un véritable américain (dans le film).

Pour sa part, et pour en revenir au droit auquel a renoncé le film, si la Cour Suprême des États-Unis n’y a pas renoncé (ce que montre bien Kevin McDonald, à travers la requête de l’Habeas Corpus), en déclarant à deux reprises inconstitutionnel ce tribunal militaire d’exception, que le Président Barack Obama lui-même, lors de son investiture, via un executive order, a réclamé la fermeture de tous les camps où étaient détenus/retenus les « combattants illégaux », le tribunal d’exception tout comme Guantánamo sont toujours, aujourd’hui, à pied d’œuvre, malgré les scandales liés à la pratique de la torture, malgré leur inutilité, comme l’a reconnu un rapport sénatorial sur la question. La raison ? Ce fameux général se trouvant dans Désigné coupable s’y étant fermement opposé. De non-sens en non-sens, pour qui observerait cette situation avec des lunettes non-américaines, comment comprendre qu’un général de l’armée américaine, sous les ordres de son Président, refuse d’obtempérer à un ordre dudit Président, comme aux sentences de la Cour Suprême, qui ont force de loi ? Or, ce qui paraît incongru ici, ne l’est absolument pas là-bas. C’est que, contrairement à la conception de la souveraineté française, issue de sa Révolution, qui est conçue sur le mode de l’indivisibilité, les pères fondateurs américains l’auraient au contraire pensé de manière divisible, de sorte qu’aucun pouvoir ne puisse incarner sur sa seule tête le peuple américain : pas plus le Président que la Cour Suprême, pas davantage le Sénat que la Chambre des représentants, nul ne saurait revendiquer à lui-seul la souveraineté de son peuple. Chacun en étant le dépositaire, mais sous la forme fragmentaire, de sorte que ce général, fort du soutien du Sénat américain dans cette affaire, puisse considérer être aussi légitime que chacun des autres pouvoirs, Président compris.

Mais Désigné coupable n’emprunte pas finalement ce seul chemin du droit, qui se voulait pourtant initialement le sien. A vouloir faire un film contre, il produit finalement un film tout contre, qui épouse bien plus qu’il ne combat la logique du Patriot Act : à Guantánamo, dans ce dernier pré-carré sauvage états-unien, le film ne pouvait pas, en effet, se terminer sur une sentence juridique mais bien divine, Dieu occupant désormais tout le Far West. Ses terres vierges. Son désert. Car si le droit n’a pas tout à fait quitté les lieux, Guantánamo continue d’exister. Une solitude (du droit/des lieux) que Désigné coupable récuse pourtant, s’efforçant de l’occuper. Non, Mohamedou ne demeurera pas seul. Avec chacun de ses compagnons de fortune (avocats, juges, militaires), tous transmués lors de sa plaidoirie finale en apôtres, chacun derrière leur pupitre, Mohamedou au centre d’un écran de télévision retransmettant en direct son discours depuis Guantánamo, recrée la cène autrement, de manière diffractée, sans doute pour être de toutes les frontières, chacun l’écoutant religieusement lors de son prêche, un choix de réalisation donnant le droit à la parole de coloniser par des célébrations comme des incantations ce territoire vidé de son droit commun, une manière de redonner puissance au Verbe créateur de l’Amérique. Mohamedou, dernier prophète, dont la racine du nom provient du premier d’une lignée, celle de Mahomet, en perpétue le principe en territoire américain, comme un bon télévangéliste, s’appuyant sur une logique de conversion. Car Dieu n’est pas approché ici avec quelque prudence comme chez le peintre Dürer, qu’il dessine avec tant d’inquiétude comme de douceur que les mains, dans son tableau, s’interrompent dans leur geste, reculent devant l’Innommable, refusent de se lier tout à fait, n’ignorant pas qu’à se serrer pour prier ces mains se refermeraient aussitôt sur un vide, laissé béant par Guantánamo. C’est que nul n’approcherait Dieu sans précautions, sauf à contrevenir à l’avertissement laissé par le poète Hugo. L’approcher, ce serait non pas courir le beau risque de l’immortalité le dernier jour venu, Socrate buvant la ciguë avant sa mise à mort, mais endurer plutôt le risque de sa ruine, s’offrir paumes ouvertes, poitrine offerte à une vie, désormais, véritablement nue sur cette terre promise/compromise par Guantánamo :

« Veux-tu planer plus haut que la sombre nature ?
Veux-tu dans la lumière inconcevable et pure
Ouvrir tes yeux par l’ombre affreuse appesantis ?
Le veux-tu ? Réponds.

Oui ! Criai-je
Alors, levant un bras, et d’un pan de son voile
Couvrant tous les objets terrestres disparus
Il me toucha le front du doigt, et je mourus
 », Dieu, Fragments.

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