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Vincent Gallo luttant pour sa survie dans la forêt dans Essential Killing
Interview

« Essential Killing » de Jerzy Skolimowski : La bannière détoilée

David Fonseca
Naître au monde. Mais dénaître ? Jerzy Skolimowski en fixe le programme politico-existentiel dans Essential Killing, qui est autant un acte de soumission - quand un État sous couvert de lutter contre le terrorisme néantise l'homme en le faisant dénaître de son vivant -, qu'un acte d'insurrection - lorsque le paria s'efforce jusqu'au dernier sommeil à la sortie de son anéantissement. Le texte est suivi d'une interview du cinéaste exhumée du grenier du Rayon Vert.
David Fonseca

« Essential Killing », un film de Jerzy Skolimowski (2010)



« Je ne sais pas si j'ai eu raison de venir sur terre quand on m'a appelé », Jean-Luc Godard


Naître au monde. Mais dénaître ? Comment y parvenir ? Voici le programme d'Essential Killing de Jerzy Skolimowski : penser la dénaissance des individus. Ce qui, chez lui, est un agent actif comportant deux pôles. Dénaître relève d'abord du registre politique, ou comment l'État, dans le cas des États-Unis, après les attentats du 11 septembre 2001, prend en charge dorénavant de manière autrement plus puissante que par le passé la gestion de la vie dans un registre hygiéniste poussé jusque dans ses extrémités, au point de se débarrasser de l'humanité de l'homme dans Essential Killing.

Mais dénaître n'est pas simplement une force de négation, elle est aussi force d'affirmation existentielle lorsque les individus s'en emparent. En ce second sens, elle n'est plus le pouvoir sur la vie, mais le pouvoir de la vie. Est-il seulement possible de faire le lien entre ces deux mouvements contraires. La vie serait orientée par deux moments cardinaux, dit quelque part depuis ces montagnes aplaties Jerzy Skolimowski : par un mouvement d'entrée dans le monde, un mouvement de sortie. Serait-ce à dire que la vie serait bornée simplement par ses extrémités, de la naissance à la mort ? La chose cinématographique est autrement ambitieuse chez le cinéaste : l'entrée est autant une sortie, que la sortie une entrée. Soit deux façons de dénaître.

Dénaître : L'entrée comme sortie

Politique I : Dénaître, c'est faire renoncer à la naissance, par quoi s'ouvre Essential Killing, film existentiel qui s'ouvre aux confins du politique. Ainsi débute le film de Jerzy Skolimowski, en ses premières secondes, par un plan curieux, qui révèle tout son programme, comme celui du Patriot Act : organiser, selon le mot de Giorgio Agamben, La vie nue, sous couvert de lutter contre le terrorisme.

L'Homme d'Essential Killing (Vincent Gallo) – qui n'a pas d'autre identité que celle de représenter métonymiquement l'Autre de l'Amérique en ce premier sens – avait sans doute une existence avant le temps du 11-Septembre 2001. Une épaisseur que lui confèrent seuls ses souvenirs dans le film, qui lui remontent le long de la colonne la nuit, le jour, qui lui rappelle qu'il fut jadis. Mais un jour de 11 Septembre 2001, le point a été fait. Tout est devenu net (figuré par ce désert/cette neige). Un jour, ce jour, l'Homme a été mort. Il est pourtant encore là, dans le film. Comment donc signifier cette étrangeté de la mort remisée par une législation extraordinaire organisant la mort juridique d'individus de leur vivant ? Peut-on se figurer un instant étale, une seconde qui durerait ainsi une éternité? Existe-t-il un temps, une concordance des temps, qui puisse exprimer la mort annoncée de l'Homme par une assemblée toute sérieuse, un corps de politiques comme de juristes, qui toutefois n’aurait toujours pas eu lieu ? Un temps qui formulerait l’espace de vie d’un sursitaire ? Un intervalle qui pourrait dire, dans le temps même de son énonciation, et la mort et la vie ? Une grammaire de mort-vivant ? Une vie fausse et vraie maintenant ? Une vie frelatée comme un parfum contrefait ? Pourrait-on dire de l'Homme d'Essential Killing qu’il a été mort ? Qu’il a été déclaré mort ce jour, qu’il est pourtant encore en vie ? Le dire dans une langue formulée correctement, au passé composé, pour signifier une action désormais révolue ? Qu’elle l’a fait une fois la mort son travail, que c’est passé, daté, enterré l'Homme-mort-vivant ? Ou bien plutôt ne faudrait-il pas inventer une nouvelle règle grammaticale, affirmative et négative dans le même temps depuis ce jour funeste du 11-Septembre 2001 : d’être et n’être pas ? A moins qu’il faille se contenter simplement du futur antérieur, disant qu’il aura été mort ? Se pourrait-il que la conjugaison autorise, dès lors, sa résurrection, puisqu’à l’annonce de la législation du Patriot Act, dont Essential Killing entend dérouler la logique interne jusqu'à son terme, il ne lui restait plus de temps à vivre ? Qu'il était déjà mort avant de mourir. Mais pourtant toujours sur pieds, serait-il possible de dire que l'Homme avait été mort ? À la forme passive cette fois-ci, puisque rien n’aurait été choisi ? Dans leurs bush, l'Homme était déjà mort. Pourrait-il se dire un jour qu’il fût ? Car l'Homme va mourir. Cela se produira, un jour, c'est certain, comme pour chacun. Mais à quelle heure ? Si chacun l’ignore, puisque la fin nous mange avant que nous ayons pu la dire, le Patriot Act a choisi pour sa part de laisser au chaos la possibilité d'éblouir et de germer sans mémoire.

Voici donc le temps de la nuit et son brouillard promis, ses puissances malfaisantes qui ont désassujetti l'Homme. Comment, par l'image, illustrer ce monstre juridique qui par le droit organise sa propre sédition, vide de tout droit l'Homme qu'il s'agira de poursuivre dans le film, cette figure du combattant ennemi, l'autre de l'Homme, soit un présumé terroriste dont pourtant nul n'apprendra rien de/sur lui le long d'Essential Killing ? Comment ? Par un simple mouvement de caméra, un curieux mouvement de caméra défiant les lois de la physique aéronautique.

En tout début de film, est ainsi entendu le bruit des pâles d'un hélicoptère survolant un territoire afghan désertique, creusé par de profonds sillons. À l'intérieur, des militaires de l'armée US en quête de terroristes qu'il s'agirait de débusquer. Mais, paradoxalement, cet hélicoptère, plutôt que d'avancer recule, le mouvement de caméra indiquant un mouvement régressif contraire, comme s'il s'agissait de remonter la mécanique de l'homme jusqu'à le nier. Organiser ainsi cinématographiquement la vie nue, en faisant machine arrière, pour en revenir moins qu'à l'os, déshumaniser l'Homme comme démarre ce plan d'ouverture de façon singulière. Au sol, trois soldats, dont un démineur parmi eux, avancent dans ce désert de Tartare en son corps sableux. Un homme, l'Homme d'Essential Killing, un afghan sans doute, sans que jamais le long du film son identité/son activité soient dévoilées, se terre dans une cavité. Confiné, renvoyé au temps de l'homme avant l'Homme, à sa Préhistoire. Cet Homme est pourchassé. Non pas un homme, mais l'Homme Ennemi, le terroriste capital : « il doit être important s’ils veulent qu’on l’attrape », dit un militaire depuis l'hélicoptère, mais dont l'importance est supposée, jamais démontrée, c'est-à-dire fantasmée. L'Homme n'a dès lors d'autre solution que d'éliminer ses geôliers comme ce gardien insondable gardait le mystère de la loi chez Kafka. S'enfuyant, il sera ensuite pourchassé, torpillé depuis les cieux par la foudre divino-ricaine, arrêté, interrogé, s'échappant à nouveau pour finir borné par les astres de la bannière étoilée, sang sur son vêtement blanc. Voilà pour l'avant-plan skolimowskien, qui montre ce qu'il cache à le déterrer ainsi.

Vincent Gallo couché dans le sable dans Essential Killing
© visuel fourni par Surreal Distribution

Car si un individu est assez vieux pour mourir aussitôt qu'il naît, écrit Heidegger, qui fait sa condition de mortel, depuis les attentats du 11-Septembre 2001, le Patriot Act est devenu plus heideggérien qu'Heidegger. Dans Essential Killing, cet Homme est mort-en-son-être. Mort de naître, soit un étant-étalé. Une manière pour Jerzy Skolimowski de mettre en débat ce que tous les autres discours sur la guerre contre le terrorisme n'auront pas su problématiser.

Essential Killing, à travers la traque de cet Homme, devient ainsi la tragédie grandiose du volontarisme politique nord-américain, de sa mésintelligence qui prendrait la partie pour le tout au prétexte de lutter contre le terrorisme, qui ne parvient pas à supporter la confrontation avec la richesse, et veut de ce fait l’étouffer – jusque et surtout en elle-même – pour ne pas être balayée. Cette politique essaie d’éliminer l'Homme et ce faisant le monde en se réfugiant dans l’espace raréfié et abstrait de l’identité d'un « nous » contre « eux », où elle rêve de pouvoir se déployer sans risque, mais où elle meurt d’inanition, comme celui qui jeûnerait de crainte d’être empoisonné : craignant de perdre son soi dans la labilité de la métamorphose, elle cherche en permanence à délimiter l’Homme, le circonscrit, comme elle s'entoure elle-même de murs. Cette défense identitaire, dont le mouvement semble quasi général en Europe également, équivaut à une autodestruction, comme la muraille de Chine qui, selon Elias Canetti, finit pas étouffer entre ses pierres l’empire qu’elle veut défendre des barbares, qui est finalement absorbé par la muraille, enseveli sous la muraille, réduit à n’être que muraille.

Essential Killing montre par l'image ce que produit cette grande odyssée du moi Américain reconquis, une politique des frontières de la personne et nationale comme de la manière incertaine dont, au contact des « autres », elles s’élargissent, se contractent, se dissolvent, se rigidifient, puisque l'Amérique, dans le film, se trouve en territoire ennemi reconquis/à reconquérir. L’ « autre », l'Homme d'Essential Killing, constitue en effet un double piège pour cette Amérique : il est à la fois le ferme obstacle de la frontière (c'est un Homme, ou plutôt un non-Homme désormais) et la fluidité de la perdition (cet Homme ne cesse pas de se déplacer : sans identité, il devient aterritorial, comme le terrorisme serait devenu transnational). Il est toujours un « autre » en soi qui impose d’être reconnu comme tel par le moi paranoïaque, lequel se voudrait unique quand l'autre se voudrait monolithique. L’altérité – le monde du « dehors » (le film se déroulant pratiquement dans une sorte de huis-clos à ciel ouvert, un décor hitchcockien) - l'altérité, donc, le menace, certes parce que cette altérité représente le différent, l’autre, mais aussi et surtout parce qu’en elle le moi flaire le « même », le sosie, le prolongement de soi, et donc la perte de soi et de ses propres frontières car rien ne distingue notre Homme dans le film d'un des autres protagonistes, si ce n'est sa barbe, Jerzy Skolimowski ayant choisi un acteur américain pour jouer le rôle d'un prétendu afghan : il faut donc choisir entre se rigidifier et périr, autrement entre deux façons de périr.

Mais toute frontière est illusoire. Ainsi le décor extérieur d'Essential Killing passe-t-il du désert le plus aride à celui du manteau neigeux qui recouvre toutes formes et lignes de démarcations existantes, y compris celle de l'Homme qui devient décor dans le décor, non pas simplement pour s'y fondre mais qui tend à faire disparaître autant les frontières de son moi : il devient autant animal, ces bestiaux qui pullulent dans le film, se trouve pris dans les crocs d'un piège pour bêtes sauvages. Or, si l’immensité mouvante de ce monde est peu sûre, les différences instituées pour permettre aux individus de se différencier et pour préserver leur propre différence afin de se distinguer de l'Homme ennemi finissent par oblitérer et paralyser cette individualité, par l’embaumer dans la mort. Le moi est sans doute une bouillie informe ; mais vouloir le minéraliser dans une identité d'Ennemi, c’est construire une obsessive pierre tombale : contre sa propre fluidité, l’individu y cherche une défense destructrice dans les cippes funéraires.

Ce que montre Essential Killing ? Que la politique de la frontière identitaire post 11-Septembre 2001 se retrouve de devoir établir des distinctions et des limites dans son effort énorme pour interpréter et classifier « eux » et « nous », dans le contexte d’une analyse qui efface toute limite, d’une législation, celle du Patriot Act qui, elle-même, se veut hors-limite, et qui démontre ainsi inexorablement la vanité de toute frontière durablement établie. Le délire de défense symbolisé par cette présence militaire en territoire étranger est une version symbolique de la mort par l’immobilité, une contre-attaque auto-mutilatrice désespérée qui, pour protéger sa fragile identité menacée est obligée d’opérer une énorme amputation d’elle-même. Essential Killing montre une profonde et bouleversante tragédie du crépuscule du sujet quand cette législation entend pourtant la refonder définitivement en instituant une figure tangible de l'Ennemi, la tragédie de l’individualité qui, sur le point d’être dissoute dans la dimension de masse, réagit en exacerbant sa singularité jusqu’à la caricature, en se rognant jusqu’à l’os.

Cette politique fait dénaître l'Homme parce qu'elle déteste le devenir et la temporalité, parce qu’elle abhorre le changement et le temps ; elle veut seulement être – pétrifiée et rigidifiée au besoin – et non pas devenir. L’unité stylisée de son style est l’emphase de l’immuabilité superbe de la forme identitaire, parodie donquichottesque et solitaire où vit une ultime et impossible nostalgie pour le retour. L’art politique qui transforme toute forme de vie en souvenir représente un refuge en même qu’une prison pour les individus, dont la représentation du camp, dans Essential Killing, devient paradigmatique.

Le moi américain qui exalte sa propre compacité inébranlable cache et en même temps accroît sa friabilité ce faisant : dans les fêlures du monde parfait de son identité, pénètre et se répand l’ « autre », notre Homme, qui personnifie une masse vitale amorphe qui n’a ni dignité ni figure (les ayant toutes, le terroriste, par définition, se dissimulant comme il se terre en début de film, tout comme il prend la peau de tous les décors en extérieur) : un ensemble qui ne tient que par la haine qu’elle suscite.

Ce que montre encore Essential Killing, absent des autres discours sur la « guerre » faite au terrorisme : pour ne pas se perdre dans cette multiplicité, cette politique de la néantisation de l'Homme aspire à le décharner en une unité monolithique mais friable, veut expulser le monde pour le réduire à n’être qu’une tête. Elle le détruit en tant que personne, se cherche et se retranche dans la quête abstraite de l’identité ; politique qui lui met la tête sous l’eau pour retrouver la tranquille intimité d’un passé fictif, c’est-à-dire pour abolir le présent qui a fait irruption dans la liberté mortuaire de ce néant. Elle use alors pour se défendre de la stratégie du puissant qui se dépense sans compter pour démasquer les métamorphoses et dissoudre la pluralité des phénomènes en la réduisant à la présence toujours identique de l’Un, pour découvrir le même et le toujours semblable dans toutes les apparences dangereuses et agressives du multiple. En le comprimant, l’espace bondé et désordonné redevient un immense et sûr néant, vide de toute chose, c’est-à-dire de toute menace. Chaque situation, dès lors, produit de la cécité, érigée en système politique, qui ne peut plus être représentée qu’à partir d’une distance zéro dans Essential Killing, la réalité étant perçue à travers les jumelles des militaires, le démineur qui touche le sol, l’œil du chien qui traque l'Homme : cet œil est collé à la réalité comme à la peau de son doigt, qui ainsi est artificiellement grossie et transformée. Le réel bouleversé de cette optique zéro crée un effet d’étrangeté. La perspective zéro de cette politique de la néantisation de l'Homme est une dérivation cohérente et radicale de l’émiettement du moi américain : à la menace de sa propre désagrégation en une multiplicité d’atomes, cette politique réagit en comprimant l’individu dans une identité, écrasé jusqu’à en devenir compact comme de la boue serrée dans un poing. Cette politique voudrait évoluer dans le monde spacieux de l’identité retrouvée, mais cet espace ne contient presque rien dans Essential Killing. Dans son domaine réduit, cette politique peut alors se comporter en véritable souverain, dont la puissance méprise la métamorphose, se suffit à elle-même, ne veut qu’elle-même. Dans cette hybris, elle s’identifie à la mort, se prend pour elle, s’arroge le droit de jouer le même rôle, en quoi consiste sa néantisation de l'Homme, soit de le faire dénaître.

Mais cette forme de dénaissance est un délire. Dans l’histoire présente, cette nouvelle « civilisation » promise par le Patriot Act n’offre en réalité plus de cachette au moi détrôné par la vie immédiate et par ses propres milices en rébellion. Tout s’effondre pour elle à vouloir minéraliser l'Homme Ennemi : quelle que soit la cachette où elle rampe, les « ennemis » lui en sortent. Ce délire est glacial, parce qu’il ne découle pas d’une crise de la raison, mais au contraire de sa présence exorbitante : c’est le délire de la raison politique, que filme sans équivalent Jerzy Skolimowski.

Dénaître se joue ainsi sur fond de contraste permanent. Ou comment l'Homme, qui n'a d'autres qualités que de n'en avoir pas comme chez Musil, est une sorte d'Ulrich : une multitude de possibilités privées de centre par une politique civilisationnelle qui entend paradoxalement mettre un terme à toute forme de civilisation. Une limaille à laquelle manque un aimant pour retrouver sa cohésion. L'Homme d'Essential Killing péri ainsi d’être inexprimable. Cet Homme est un homme moins l'homme, il est le résultat d’une soustraction. L’économie de cet Homme sans qualités : des petits chiffres qui totalisent le grand nul, afin qu'il éclate et meurt dans ses débris.

Vincent Gallo dans le paysage enneigé de Essential Killing
@ Surreal Distribution

Cependant, Essential Killing est autant le récit d'un homme qui, perdant sa majuscule, retrouve une forme de dignité minuscule. Un homme non plus considéré en tant que grand Ennemi, mais de l'homme qui, au plan existentiel, ne veut pas n'être dans ce monde, écrirait sans doute Lacan. Et qui va s'efforcer de dénaître, de s'accoucher à l'envers dans l'espoir, peut-être, de re-naître. Car cet homme ne veut pas sortir de sa cache allégorique aux allures de sexe féminin, en début de film, il faut y revenir, dont l'entrée est filmée, à l'instant de sa sortie, après avoir tiré au lance-roquettes sur les trois soldats qui marquaient une pause, en plan serré, vaginalement. En s'attachant à la fuite de cet homme, le cinéaste illustre alors autrement ce à quoi il est tant attaché, qui fait la condition des expulsés, installant de film en film à travers chacun de ces personnages-parias une solidarité des ébranlés, qui sont aussi un peu nous, chacun d'entre nous, au monde, « insulairement » situés dit Peter Sloterdijk, esseulés après la naissance, ce que rappellent Des Nouvelles du Front à ce propos. Dénaître non plus comme acte de soumission mais de rébellion.

Dénaître : La sortie comme entrée

Politique II. Ce qui fait la puissance du film autant que la contradiction à partir de laquelle il est construit, est qu'à ce mouvement de déshumanisation, de retour en arrière, correspond de manière symétriquement opposée la réponse de l'homme traqué par un mouvement de sortie (de sa cache) qui est autant une entrée dans Essential Killing.

Les premières minutes génériques du film sont encore précieuses d'indications. En effet, sa sortie au grand jour, sa venue au monde, n'est pas le fait des militaires. La pénétration avant gestation dans la cache suit un mouvement inverse de celui de cet hélicoptère qui avançait dans le ciel à reculons. Les militaires, en effet, s'arrêtent au porte de la cache de l'homme. Ils n'y pénétreront pas de leur arme, débandée, en berne, symbolisée par cet appareil de déminage porté par ce militaire à mi-hauteur de son corps, excroissance d'un organe sexué qui touche de son gland parabolique le sol. C'est bien plutôt notre homme qui lèvera le sien en forme de protestation, médiatisé par ce lance-roquettes érectile, pour s'extirper de sa cavité. C'est lui qui les pénétrera à l'aide de son lance-roquettes plutôt que d'être plombé par leur semence. Une explosion séminale qui produira ses effets, l'Homme redevenu homme quittant sa cache désormais, parcourant de longs cordons spermatiques en un acte de reproduction montée à l'envers. Comme s'il avait fallu à l'homme s'énucléer à la puissance du canon des forces d'attractions ovulaires de son antre où il s'agissait, pour les militaires, non pas de le faire advenir, mais de le faire périr. Un acte, en effet, purement terroriste. Car dénaître, chez Jerzy Skolimowski, n'est pas simplement l'affaire des États, vidant de son humanité l'Homme. L'acte de dénaissance est autant un acte d'insoumission pour l'homme. Une protestation autant qu'un refus de celui qui décide de ne pas se laisser réifier, devenir la roche de cette roche désertique, un poing levé à la bêtise plus dure qu'un roc écrivait Flaubert, toute cette roche accumulée en ce début de film qui forme montagne et paysage rendus imbéciles.

Mais alors, la problématique du film change de sens. Comment, en effet, accepter qu'un être puisse dénaître de son vivant ? Comment comprendre un tel refus de la part de celui qui se trouve pourtant au monde ? Naître, très bien, l'affaire est entendue, est d'ordre biologique. Mais dénaître, ou plutôt, naître à soi, devient politique autrement dans Essential Killing. Que faire cependant de tous ces reclus de l'existence que ne cesse pas de filmer Jerzy Skolimowski, qui ont choisi la cache comme manière d'y être (Bateau-phare, chambre d'Anna, grotte d'Essential Killing, piscine de Deep End, voiture du Départ...)? L'homme désaffilié d'Essential Killing devient sitôt un être générique, n'incarnant pas seulement la figure de l'Ennemi mais la condition de l'homme après le naufrage de sa naissance, qui en font un être de solitude. Que faire de cet abandon en forme de protestation dans le film ? Le traquer autant. Le ramener vers la société décapée des hommes. Le placer dans le bon camp. Et l'y enfermer. Et c'est ainsi que l'homme sera bientôt, en effet, intercepté, incarcéré, pour s'échapper à nouveau, puis de nouveau traqué jusqu'à se faire posséder la peau.

Voilà ce que filme en un autre sens Jerzy Skolimowski, la venue au monde de celui qui a choisi le moment politique de sa naissance. Dénaître biologiquement pour renaître existentiellement, qui emporte d'emblée une conséquence non pas simplement symbolique mais politique. Mais cet homme, chez Jerzy Skolimowski, dans toute sa filmographie, dans Essential Killing y compris, comment simplement l'appréhender, sauf à le cerner de toutes parts ? Comment cet homme qui vient de dénaître comprendrait-il par ailleurs le langage du commun, celui de son inquisiteur comme celle de son traducteur, à l'instant de comparaître devant ce juge militaire, après avoir été capturé ? Montré sourd à l'écran, nouveau-né, du monde il n'entend que ses bas bruits autant qu'il sera muet tout le long du film, sauf à prononcer un cri, le seul son qui sera perceptible, un cri primal comme pour se débarrasser de tout ce qui le minéralisait. Pas un mot. Pas une parole comme l'homme est sourd à ce monde. Comment le pourrait-il ? Sa naissance vient tout juste de se produire. Il en est encore à l'aurore celui qui vient de dénaître. Occupe dès lors de toutes choses, non pas le milieu, mais les marges comme tous les autres personnages skolimowskien. Le blanc de la page, ils ne peuvent pas simplement le remplir. Le refusent. Ne pensent pas même, à l’instar du moine, qu’en se retranchant de cette vie ils la rempliraient, car peu de choses se plaisent en se regardant dans leurs mains.

Le choix du décor extérieur opère dès lors comme un trompe-l’œil dans Essential Killing quand dans les autres films de Jerzy Skolimowski se multiplient les lieux de claustration. Notre homme se meut mais pourtant ne bouge pas. Il est enfermé dehors, dans un huis-clos toutes portes ouvertes, plutôt, un monde sans portes, sans ailleurs décidable. Tourne plutôt en rond et rebondit indéfiniment sur lui-même. Fatalité de son ici-bas. Circularité harassante et monotone : tout semble recommencer toujours et de la même façon pour lui. Immuable, finalement, le point de départ et le point d’arrivée se touchant, façonnant son histoire en une spirale qui revient sans cesse sur elle-même, qui forme un trou, seul territoire accessible aux exilés de naissance. S’y soustrayant s’emprisonnant comme dans autant de logiques utérines à l’œuvre dans la filmographie du cinéaste pour retrouver vainement la mémoire d’une intimité perdue, lieux où il faut battre en retraite, aspiré par cet œdème intime, infiltré par son silence qui irradie. Le ventre de leur vie. Leur trou noir.

L'homme s'efforcera pourtant à la résistance dans le film. Prendra les couleurs du monde, notre homme sans cesse fondu enchaîné dans le décor, qui s'efforce d'en prendre les teintes comme les nuances : couleur sable dans son désert, vêtu de blanc dans la neige, sang sur son or au moment de dénaître enfin tout à fait, emporté sur un cheval blanc, second moment du film où les couleurs, par leur effet de contraste, trancheront son destin, partir en lune, enfin, en toute fin.

Toutefois, dans Essential Killing, cette sortie hors le monde est précédée d'une scène essentielle. L'homme trouve refuge dans une nouvelle cache avant de sortir du cadre définitivement. Il est accueilli chez une femme (Emmanuelle Seigner), effet notable, autant sourde/muette que lui, à qui elle offre l'hospitalité, au sens derridien du terme, sans conditions préalables. Une hospitalité inconditionnelle qui s'apparente à une « visitation » de l'homme chez la femme, qui n'est pas une invitation de la femme faite à l'homme, invitation qui jouit toujours du privilège de la règle en usage dans la maison, la règle domestique que le propriétaire des lieux imposera souverainement à son hôte. Une visitation explorée par Jerzy Skolimowski au sens le plus fort du terme : quand l'invitation est conditionnelle, la visitation est sans conditions préalables. L'arrivant de la visitation, qui est notre homme dans Essential Killing, est toujours un être indéterminé. Il est par excellence l'Étranger, par où cette indétermination devient une force dans le film. La femme, en effet, lève alors toutes les barrières de protection que le système immunitaire du Patriot Act lui intimait pourtant de ne pas abolir. Elle accepte comme nul autre de s'exposer à ce visiteur dont le comportement comme les lois qui le régissent sont imprévisibles. D'où vient-il, que fait-il, que lui arrive-t-il, ne sont pas des réquisits à son entrée dans son monde. Elle accepte ainsi de dénaître elle-même en se transformant sous l'effet de sa présence, au risque de perdre son identité, en se commuant en infirmière, le soignant. Elle accepte que celui qui n'avait plus de droits fasse la loi chez elle, dans un « chez soi » qui est pourtant devenu impossible à vivre depuis cette présence américaine sur son sol. Le retournement est saisissant en fin de film. L'homme qui n'était plus un homme le redevient souverainement mais par l'effet d'un geste anté-souverain qui ne lui appartient pas. C'est que cette hospitalité qui lui est faite est d'avant la loi, de toutes les lois, y compris celles de ce Patriot Act qui a pourtant entendu se placer extra legem, au-dessus de toutes les lois. C'est une loi d'avant la loi qui ouvre la possibilité d'un accueil, autant dire d'une renaissance. C'est un « oui » à l'autre qui répond à une promesse d'acquiescement. Un oui à l'autre, qui devient un oui de l'autre, qui répond de la responsabilité de cet homme qui vient de dénaître, qui n'est encore qu'un infans, un nouveau-né. Une sollicitude dont la figure courante est celle de la mère chez Jerzy Skolimowski, cette figure maternelle qui traverse nombre de ses productions, dont Derrida contesterait sans doute l'androcentrisme, qui ici affirme que la solitude de l'homme n'est plus l'isolement, qui est sans doute un malheur. L'hospitalité est ainsi l'autre nom de la dénaissance comme sa signification : même si Dieu nous abandonne, ce Dieu absent qui s'adresse si souvent à notre homme dans le film, dénaître, c'est maintenir de façon permanente un désir d'altérité, savoir l'accueillir, en sachant laisser venir l'autre. Pour dénaître, encore faut-il que de l'espace soit disponible, qu'il ait été renoncé à sa colonisation comme à son occupation définitive par une main puissamment abrutissante. C'est à ce seul prix que la dénaissance pourra se produire, parce que des femmes, des hommes, auront su mieux que d'autres inventer un espace de rencontre, de compromis, d'émergence poétique, qui laisse à l'autre chaque fois une place unique à son hétérogénéité, qui refuse la stabilité de l'identité, sauf à devenir tout à fait fou. Une hospitalité portes toutes ouvertes, qui peut laisser partir l'homme, enfin, au petit matin, mais qui ne fonde pas un humanisme, après que le Patriot Act l'ait bafoué. Cette hospitalité, dans Essential Killing, est au-delà de l'humanisme. Elle ne vaut pas seulement pour l'humain, mais pour l'animal (médiatisé par ce cheval blanc sur lequel l'homme aboutit sa course, qui finit seul dans le cadre), pour le végétal (cette fleur qui perce neige, ces herbes hérissées frondeusement) autant que pour le non-vivant (ce minéral), soit, finalement, un Cosmopolit Act.


Interview de Jerzy Skolimowski


Vous avez souvent travaillé avec des acteurs caractériels. Pourquoi avoir choisi Vincent Gallo, qui n'est pas réputé pour sa facilité, et comment s'est déroulé le tournage ?

 
Nous avons décidé de travailler ensemble l'année dernière, lorsque nous nous sommes croisés au Festival de Cannes. Coppola montrait Tetro dans lequel Vincent incarnait le personnage principal. Nous nous connaissons depuis des années puisque nous avons joué ensemble dans L.A. Without a Map, un film hollywoodien. Vincent possède une part bestiale, animale, qui est absolument fascinante. Il sait se servir de son corps comme personne. Quand je lui ai proposé le scénario d'Essential Killing, il l'a accepté avec joie et, deux heures plus tard, il m'a appelé, excité, pour dire qu'il voulait absolument faire le film. Il jugeait les conditions de tournage idéales. Elles correspondaient exactement à ce qu'il était capable de faire. J'étais évidemment très heureux qu'il accepte ma proposition. Mais une fois sur le tournage commencé, il s'est révélé difficile à contrôler, ce qui a posé pas de mal de problèmes à tout le monde. Il s'est totalement investi dans le rôle. C'est sa méthode à lui, très pratique, très sensorielle. Il a puisé dans sa vie personnelle pour enrichir l'existence du personnage. D'ailleurs, il s'est toujours un peu considéré comme quelqu'un qui lutte contre tout le monde. Ce fût donc une épreuve à la fois émotionnelle et physique pour lui, et ce n'était pas facile à supporter. Néanmoins, le résultat est excellent, et pour moi cela efface tous les problèmes que nous avons rencontrés. Jamais je n'aurais pu imaginer ou trouver quelqu'un d'autre pour réaliser tout ce que Vincent a fait pour Essential Killing.
 

Avez-vous cherché à faire un film sur l'interventionnisme américain ou bien est-ce juste un prétexte pour commencer l'histoire ?

 
Il n'y a pas d'aspect politique dans Essential Killing. Je me tiens à l'écart de tout ce qui touche, de près ou de loin, à ce domaine. Il y a des années, quand j'ai réalisé Haut les mains, j'ai connu les foudres des autorités et de la censure dans mon pays. J'ai été forcé de quitter la Pologne et de partir à l'étranger. Pour cette raison, j'évite vraiment de faire de la politique dans mes films. Bien entendu, l'introduction d'Essential Killing renvoie à un contexte reconnaissable (un désert, des soldats, un conflit...), mais la situation reste vague et ambiguë, rien n'est concret. Les noms et les identités restent inconnus, le lieu est indéterminé, etc. C'est juste l'histoire d'un type qui est pris en chasse par l'armée américaine. Je vois vraiment ce passage comme une introduction au film, et non comme une revendication politique ou un engagement critique.

Vincent Gallo poursuivi par un hélicoptère dans le désert dans Essential Killing
@ Surreal Distribution

La musique d'Essential Killing possède un caractère sacré. Qu'avez-vous cherché à montrer en utilisant ces sons "indiens", presque chamaniques ?

 
La musique d'Essential Killing est vraiment spécifique, elle n'a pas de dénomination particulière. Nous avons certes utilisé des sonorités et des instruments orientaux, mais on ne peut pas dire de quelle sorte de musique il s'agit. C'est une musique très émotionnelle qui n'est pas fréquemment utilisée au cinéma. Ce qui crée, au final, une bande son assez inhabituelle.
 

Vous avez une prédilection pour les outsiders. Quels sont les acteurs les plus intéressants pour vous ?

 
Il est vrai que les personnages de mes films sont souvent des outsiders. Le choix des acteurs ne se fait pas par accident. Pour correspondre à ce type de personnage, il faut nécessairement trouver des personnes capables de les incarner. C'est pourquoi, tout au long de ma carrière, j'ai souvent travaillé avec des acteurs très difficiles qui ont toujours livré des performances extrêmes : Klaus Maria Brandauer, Nastassja Kinski, Gina Lollobrigida... Ce sont des acteurs géniaux, mais des personnalités infernales ! C'est le prix à payer si vous voulez atteindre votre objectif. Il faut, par un moyen ou un autre, réussir à équlibrer la balance. Qui d'autre qu'un individu complexe dans la vie peut interpréter un de mes personnages ?
 

Vous considérez-vous comme un cinéaste nihiliste ou un vitaliste ? Quelle est votre conception de l'humanité et de la vie ?

 
Je ne pense pas faire partie d’une catégorie ni raisonner en ces termes. Je prends les sujets et les histoires comme ils viennent et je vois ce qu'il advient. Je travaille sur les émotions extrêmes et l'expérience que l'on peut faire de la vie, c'est un fait. Mais je ne raisonne pas avec les mots de "nihilisme" ou de "vitalisme". Je suis ouvert à toute forme de choses, d'idées et de regards, à tout ce que peut apporter une histoire et à tout ce dont elle peut avoir besoin.

Vos personnages sont souvent dépassés par quelque chose de plus grand qu'eux (un sentiment, un état d'esprit,...). Est-ce que vous cherchez à exprimer visuellement ce que les personnages ressentent à intérieurement ?

 
C'est, en effet, un des traits majeurs de mon cinéma. Depuis que je ne ne crois plus aux dialogues, j'essaie toujours de trouver la nature du comportement qui s'exprime à l'intérieur des personnages.
 

Dans la plupart de vos films, les choses se répètent à l'intérieur d'un cycle ou d'une spirale qui finit toujours par déboucher sur des événements tragiques. Pourquoi choisissez-vous cette forme de narration ?

 
C'est sans doute quelque chose qui est lié à ma propre personne. J'ai probablement besoin de retourner constamment aux mêmes sujets, mais aussi aux mêmes réactions, car elles se répètent encore et encore. Je crois que ça me concerne en grande partie et que c'est lié à mon caractère.
 

Vous avez fait une pause dans votre carrière de réalisateur tout en continuant à peindre. Est-ce que cela a influencé votre manière de faire des films ?

 
J’ai peint toute ma vie mais j’avais de moins en moins de temps pour le faire. Donc, les dix-sept ans de pause que j’ai fait dans ma carrière au cinéma m’ont permis de me concentrer pleinement à la peinture, qui est ma vraie passion. Mais pour moi, la façon d’aborder le cinéma est totalement différente de celle d’aborder la peinture. C’est un processus créatif tout à fait différent. Quand je peins, je suis seul. Je suis le maître de la situation. J'effectue tous les choix par moi-même, et je suis responsable de chaque élément apparaissant sur le tableau. Tandis que le cinéma, c’est un travail d’équipe. Il faut utiliser chaque personne selon ses compétences, savoir aiguiller les gens et faire preuve de beaucoup de diplomatie pour arriver à ses fins. C’est une combinaison d’éléments disparates. Donc, à mon avis, ces deux domaines n’ont rien à voir l’un avec l’autre. Évidemment, j’ai une approche esthétique qui est la même pour les deux arts, mais je ne pense pas que j’utilise des éléments de mes peintures dans mes films ou vice-versa.

Quel est votre vision du cinéma d’aujourd’hui et quels sont vos projets futurs ?

Tout d’abord, je n’ai pas de nouveau projet. Je travaille toujours sur un seul projet à la fois et, une fois que c’est fini, j’attends que quelque chose se passe et qu'une nouvelle idée survienne. Mais je ne suis jamais sûr que cette idée viendra jusqu’à moi. Deuxièmement, je ne suis pas très enthousiaste face à ce qui se passe dans industrie du cinéma aujourd’hui. Je pense que le cinéma contemporain est trop dépendant des effets spéciaux, et que le montage a été beaucoup trop influencé par MTV. Ce n’est pas ce que j’aime au cinéma, et je ne pense pas que nous vivions une bonne période pour le cinéma en tant qu’art.
 

Est-ce pour cette raison que vous avez voulu refaire des films, après autant d’années d’absence ?

 
Oui, il y avait de cela dans ma démarche. Comme je n’aimais pas grand chose dans le cinéma actuel, je voulais voir si le cinéma qui me plaît avait encore de l’avenir et s’ils pouvaient encore être accepté aujourd’hui. Et, heureusement, avec Quatre nuits avec Anna et Essential Killing, je pense avoir réussi à prouver que ce type de films a encore sa place et peut être apprécié, pas seulement par moi-même mais aussi par certains spectateurs.


Propos recueillis par Guillaume Richard et Thibaut Grégoire en 2011.


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